A propos de dominations, de système patriarcal et de non-mixité

A propos de dominations, de système patriarcal et de non-mixité donc, et notamment dans le cadre des AG de lutte. Ça fait un peu dit, répété, mâché et remâché, mais dans la mesure où ces questions sont revenues (ou venues) au cœur de nos discussions, on a aussi voulu revenir sur quelques points. L’idée étant d’en faire une piste de réflexion pour les AG de lutte à venir !

Le sexisme, ou le patriarcat, sont des systèmes. En cela, ils s’appliquent à tou.te.s : femmes (cis ou non) et hommes (cis ou non). Il influence nos identités, nos comportements, nos sexualités. Il agit dans l’éducation de tous et de toutes, dans nos représentations, dans nos imaginaires. Cependant, force est de constater que l’on n’a généralement pas le même vécu selon le genre dans lequel on évolue. En tant que meuf, on nous a toujours – ou très souvent – appris à ne pas faire trop de bruit, pas trop gueuler quand on en avait envie, parce que une fille ça gueule pas : une fille c’est bien souvent ramené à la séduction, à la douceur ; c’est pas classe une gueularde, c’est pas séduisant, et puis on t’a pas demandé de t’affirmer, on t’a demandé d’être sympa et souriante parce que l’agressivité ou la colère c’est pour les garçons virils. On a même intégré qu’il fallait pas trop gueuler si on se fait agresser ou violer, parce que ce qu’il risque de se passer c’est qu’on va nous culpabiliser/décrédibiliser. On a appris (et c’est parfois long de désapprendre) à avoir peur dans la rue une fois la nuit tombée ("tu vas quand même pas rentrer toute seule à cette heure ci ?"), parce que nous sommes censées être vulnérables aux attaques potentielles d’agresseurs/violeurs de toutes formes.

On a appris, toutes seules cette fois, à se blinder face aux multiples réflexions/agressions physiques ou verbales qu’on peut se manger dans l’espace public, professionnel, ou même privé, du "t’es bonne, salope" au "j’ai accepté votre CV parce que vous étiez vraiment mignonne" à la réflexion de tonton Bernard sur ton physique de fâme qui enchante le dimanche en famille. L’espace public, politique, économique, médiatique appartient aux hommes. La visibilité et la parole leur reviennent de droit depuis très longtemps, et c’est seulement à coups de luttes que l’on a pu octroyer plus de place aux personnes qui ne jouissent pas du privilège masculin hétérosexuel.

En fait, on pourrait énumérer beaucoup de conséquences du privilège masculin sur le vécu des meufs, partager beaucoup d’expériences qui concordent sur le fait, que oui, il y a bien un système qui encourage la domination d’une norme de genre sur une autre. Que l’éducation des mecs les conduit beaucoup plus facilement à prendre de la place et de la voix dans l’espace. Et le milieu militant antiautoritaire, anticapitaliste, autonome n’en est pas dispensé.

Parce que oui, l’homme cis hétérosexuel ET blanc correspond à la norme privilégiée, qu’il soit pro-féministe, militant autonome n’y change rien. Plusieurs textes ont déjà circulé sur le fait que le milieu autonome/militant n’échappe pas non plus aux comportements machistes et violents. Sûrement peu d’entre nous seront passé.es à côté du "Allez tous vous pendre, vous nous rendrez service" assez édifiant sur les agissements de certains au sein du middle toto. Et si vous pensez qu’autour de vous ce n’est certainement pas le cas, si vous pensez que vous et vos ami.e.s êtes totalement exempts de comportements dominants, et bien réfléchissez-y à deux fois.

Du coup, au sein d’une AG de lutte, le fait que majoritairement quelques mecs (hétéros cis, déso) prennent systématiquement la parole n’est pas anodin. L’idée, c’est que le sexisme n’est pas LA seule oppression qui nous traverse. Certain.es disposent de plus de ressources symboliques que d’autres : parcours militants, lectures, expériences, connexions inter-personnelles avec d’autres membres de l’AG. L’assemblée de lutte est constituée majoritairement de personnes blanches, non-racisées, qui donc n’ont jamais subi l’oppression raciste, et rentrent dans la norme blanche du système néo-colonial dans lequel nous vivons tous.tes. Du coup, quand tu as tes potes autour de toi en AG, que ça fait longtemps que tu milites, que tu es habitué aux pratiques virilistes en manifs ou actions, et que tu es un mec blanc cis hétérosexuel : bingo, tu gagnes la palme du privilège et de l’aisance pour t’exprimer au sein d’une AG de lutte.

Ceci posé, il n’est donc pas étonnant que beaucoup de personnes aient demandé à se diviser en commissions pour avoir plus de facilités à parler, que les discussions en plénières peinent à décoller, que les débats de fond aient du mal à être abordés. Et dans la mesure même où nous serions dans un cadre parfaitement safe - ce qui n’est pas le cas, cf l’article cité au-dessus - mettre en place des actions entre concerné.e.s comporte une indéniable force. L’empowerment [1], ça vous parle ?

Il semble nécessaire d’avoir une réflexivité sur ce qu’il se passe dans cette assemblée, de prendre conscience du fait que si certain.es ont du mal à communiquer ce n’est pas seulement par timidité ou raisons personnelles : une meuf/trans/minorisé.es sexuelle qui va avoir du mal à s’exprimer publiquement, à porter des débats, c’est aussi (surtout ?) systémique.

Mis à part les tracts "Femmes et loi Travail", la question du genre a été très peu abordée au sein de cette AG. Pourtant, si on veut renverser le système et qu’on s’applique à détruire les oppressions, il aurait été nécessaire de penser à s’attaquer radicalement à l’oppression sexiste, pilier du système politique, économique, de l’État capitaliste et policier. Aucune action féministe par des meufs ou alliés n’a été envisagé avant, et celle qui a été pensée n’était qu’une continuité de ce que les nanas du Planning Familial 31 avaient déjà initié, et après qu’il y ait eu des inculpés à Rennes. En fait, il semble que pas grand monde de l’AG de lutte n’ait ressenti l’urgence de dénoncer le sexisme et de le combattre collectivement, avant de reprendre cette action. Bien évidemment , tout le monde est censé être allié, être contre le patriarcat. Il faut donc admettre qu’une AG de lutte, aussi volontairement horizontale soit-elle, est traversée par différents facteurs de dominations, et il est primordial que chacun.e sache se situer selon sa position et ses privilèges. Cela pour avoir une critique de ses propres pratiques, en AG, en manif, chez soi.

Se dire féministe en tant qu’homme, c’est bien. Prendre conscience de ses privilèges, et les combattre, aussi laborieux et irritant que ça puisse être, c’est mieux.
Cela implique d’accepter que si quelqu’un te dit« je ne me sens pas apte à parler/agir dans ce contexte », c’est qu’il/elle le ressent et que ça EXISTE. Que tu ne peux pas l’ignorer.
Cela implique aussi de ne pas mépriser les catégories d’oppression (et leurs appellations) qui ne "valent" pas celle de l’oppression capitaliste (et donc ici la seule par laquelle on peut se sentir concerné en tant que mec blanc cis). C’est facile et ça permet de ne jamais se remettre en question. Si combattre le capitalisme empêche de s’attaquer en parallèle aux oppressions de genre, de race, alors il y a clairement un problème.
"De ne pas expliquer à une militante féministe qu’elle s’y prend mal, qu’elle a tout faux, et que vous, vous savez comment vous y prendre. C’est insultant, complètement déplacé et cela contribue, in fine, à l’oppression. Le féminisme est la lutte contre l’oppression spécifique que subissent les femmes et pour l’égalité. Si vous êtes un homme, a fortiori non féministe, une militante féministe est deux fois mieux placée que vous pour savoir ce qu’est le sexisme et comment lutter contre lui." [2] En fait, il arrive régulièrement aux dominé.e.s d’être exclu.e.s d’espaces ou de pratiques. Ça fait relativement peu de bruit. Mais lorsque des dominants sont touchés on les entend énormément, d’où un flot de réactions et/ou demandes de justification. "Essayez d’y réfléchir avant d’engager un débat sur les modes d’action qu’elle a choisis." [3]

Il serait réellement triste que la potentialité d’organiser des actions non mixtes soit envisagée comme une division de l’AG de lutte – certain.e.s ont au contraire pensé qu’il s’agissait d’une occasion de porter un message politique de plus, radical, déterminé, etc. Si la réflexivité doit aussi être portée sur la manière dont la possibilité d’une action non mixte a été amenée, le fait que nombreux.ses. soient celleux qui y aient adhéré invite à se poser la question de la présence (ou du manque de présence) des problématiques féministes au sein de l’AG.

Des meufs anticapitalistes, féministes, antiracistes, le tout sans hiérarchie.

P.-S.

Plus d’articles sur le militantisme et les espace non safe :

http://iaata.info/Il-n-y-a-pas-d-espace-safe-1385.html

Ça pue, camarades sexistes

La manif du 14 juin m’a laissé un goût amer, pas seulement en raison des violences policières et de la manipulation médiatique qui s’en est suivie, mais également parce qu’elle a constitué pour moi une piqûre de rappel de la vivacité de la culture du viol dans nos milieux militants.

Le Bugey C’Trip, festival « culturel et enragé », mais quand même pas féministe (faut pas exagérer)

Au Bugey C’Trip, festival qui se veut militant, des membres de l’organisation soutiennent des harceleurs qui sévissent dans leurs concerts...

Notes

[1Sur l’empowerment, Elisabeth Marteu dans "Des usages de l’empowerment, du genre et du féminisme dans les associations de femmes bédouines du Néguev (Israël)" :
"La notion de pouvoir, élaborée par les organisations féministes et reprenant les réflexions de Foucault, identifie quatre types de pouvoir : le « pouvoir sur » (domination, subordination, résistances), le « pouvoir de » (capacité de prendre des décisions et d’accomplir des choses), le « pouvoir avec » (solidarité, mobilisations collectives), le « pouvoir intérieur » (estime de soi, changements pour soi) L’empowerment vise donc bien à l’acquisition de pouvoir (en priorité ici le « pouvoir de », le « pouvoir intérieur » et le « pouvoir avec ») et au libre choix individuel pour décider de sa vie. Ce qui impose de prendre en considération les situations de vulnérabilité, de contrainte et de domination qui conditionnent la décision et le choix individuel. [...] le développement personnel des femmes, l’estime, la confiance en soi. "

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  • 17 juillet 2016

    Qu’on me permette de contester l’utilisation d’"identité" lorsqu’il s’agit de rapport sociaux de genre, de race et de classe. Qui produisent des assignations, des "places" sociales d’où le monde est plus où moins beau à voir et à vivre. Ces rapports sociaux produisent des expériences singulières qui dessinent des alliances possibles ; produisent des clivages qui structurent nos réalités. Les différentes formes de non mixité choisies et politiques s’appuient sur ces possibles alliances, sur ces clivages en générale dans une perspective d’émancipation. Et les débats pour savoir qui peut y prendre part sont bien loin de l’identité essentialiste et figés pointé par le commentaire du 13 juillet.

    Quand nous luttons, nous partageons tous le trait exploités, précaires, prolétaires, quel que soit le mot, nous faisons partie de ceux qui savent ce que c’est de ne pas avoir les moyens d’accéder à certaines choses, des espaces, des biens et des services, nous savons que nous n’avons pour l’instant aucun moyen d’échapper à l’exploitation qui nous est infligée, et nous la subissons tous."

    Il est très difficile de se représenter ce que fait à sa personnalité l’expérience quotidienne du racisme, du sexisme, de l’homophobie etc... Seul.e.s les personnes qui le vivent ont ce savoir et peuvent le transmettre à conditions qu’elles puissent en faire une parole collective, au delà de la prise de conscience d’être victime... Elles peuvent aussi faire de ce constat un socle de lutte plus ou moins partiel, plus ou moins spécifique...

    Il n’y a aucun privilège à être utilisé comme main d’œuvre par des patrons, nous n’avons aucun intérêt à nous diviser selon leurs critères, ça serait jouer leur jeu. En attaquant directement l’exploitation, nous attaquons entre autre ces constructions identitaires qui nous asservissent à des fonctions.

    Faut-il dès lors attendre que l’exploitation soit mis à bas pour en finir avec les rapports sociaux de genre et de race ? Est-ce que les rapports sociaux de genre et de races n’ont de réalité qu’au travail ? En plus d’être fondé sur des prémisses douteux cette hiérarchie ne dit rien du comment mettre fin à l’exploitation. Comment faire l’alliance des exploité.e.s et dominé.e.s ? Comment faire le nécessaire mixe de proposition à court, moyen et long terme qui permet de fabriquer une unité d’action ? En claire comment prendre en compte des situations spécifiques dans la perspective d’un changement global ? Et qui doit attendre dans une position plus inconfortable, plus difficile ? On pourrait reprendre la phrase de Brecht ici « Un certain type d’intellectuel révolutionnaire éveille la suspicion du révolutionnaire prolétarien : c’est celui qui attend de la révolution une amélioration totale. N’étant nullement soumis à une oppression intolérable, optant librement pour ce qui lui paraît préférable il choisit la révolution »

    Il s’agit de se définir dans un système, 100% des prolétaires subissent l’exploitation, c’est ce qui les définit, ce n’est ni un ressenti ni une statistique mais une fonction qui fait système.

    Est-ce que l’analyse objective suffit à faire mouvement ? Qu’est-ce que subir l’exploitation ? Si dans ma collocation, mon couple, mon groupe politique, je fais l’essentiel des tâches ingrates et répétitive pour laisser la parole et la décision à d’autres : suis-je exploité.e ? Si dans ma vie je fais un boulot plaisant qui me prend peu de temps et me donne suffisamment d’argent pour vivre ? Suis-je exploité.e ? Si je suis artisan.ne ou travailleur.euse indépendant.e ? Rsaste à vie ? Eléveur.euse ?
    La dimension subjective de la position sociale n’est pas une mince affaire et tous les cours de socialisme scientifique n’y pourront rien. Alors là oui on revient à une notion d’identité, d’identification (comme rapport à d’autres en qui je me reconnais) comme un ancrage, un appuie pour faire et pour faire ensemble. Bien loin d’une "identification" close et figée mais aussi à distance d’une "citoyenneté" sans sexe, sans couleur, sans appartenance sociale, sans distinction. De plus mettre dans la prise de conscience d’un seul rapport social l’alpha et l’omega de la libération finale, c’est se confronter sans cesse, dans la réalité, à des positions spécifiques que l’on devra "conscientiser", "désaliéner" et, ainsi, jamais cesser de reproduire la geste désespérante et désespérée de l’avant garde éclairée.

    Ce qui nous définit n’est jamais qu’un seul rapport social même aussi déterminant que le capitalisme qui a la palme de la "structure structurante" de nos jours il est vrais. Et très clairement si l’on peut dire suite au "commentaire" du 13 juillet critiquer le mépris des rapports sociaux de races et de genres il est tout aussi vrai que souvent la question du capitalisme comme rapport social est négligé...

    //// Casser la gueule à qui ? On ne peut pas casser la gueule à un système... ///

  • 14 juillet 2016

    Et la voilà enfin la réponse marxiste publique à ce texte, semble-t-il, si polémique.

    Pour mieux saisir ce dont cherche à parler la personne derrière le commentaire précédent, peut-on lui demander ce qu’elle entend par « prolétariat » et par « exploitation » ?

    Peut-on aussi lui demander si elle est en désaccord avec, à tout hasard, cette affirmation : « 100% des femmes subissent le sexisme » ?

  • 13 juillet 2016

    Les dérives identitaires dans les milieux gauchistes.

    Depuis quelques temps, on observe un regain d’intérêt en général en France pour tout ce qui se rapporte à l’identité. Cette notion partagée par des tendances très variées allant de l’extrême droite à l’extrême gauche, entre les plus nationalistes comme Soral, Sarkozy, ou par certains théoriciens défenseurs de communautés. Les paramètres qui définissent les identités sont plutôt flous, depuis des termes aussi vagues que l’origine ou la culture, des découpages géographiques, des couleurs de peau, la religion, les préférences sexuelles, voire même certains handicaps. Il est important d’expliquer en quoi, pour beaucoup d’entre nous, il nous paraît extrêmement dangereux défendre un concept tel que « l’identité ».

    Comment l’identité se construit

    Les façons de faire recours à l’identité sont très variables même chez les gauchistes. Une construction très commune est basée sur l’opposition. On considère qu’on subit une discrimination sociale qui se base sur certains traits, et qu’il faudrait recomposer une entité discriminée pour s’opposer à ceux qui n’en sont pas victimes (qui sont parfois même appelés « dominateurs »). Il s’agit donc d’une réaction que certains définissent par un vécu d’autres par des données plus statistiques. En réalité, si on réfléchit à ce procédé, il est relativement difficile de faire exister en entité ces expériences et ces statuts inventés parce que la discrimination des fachos n’obéit pas à un système fixe. Certains racistes, quelle que soit leur couleur de peau, n’aiment pas les chinois mais trouvent les noirs très sympathiques et les arabes voleurs, ils n’ont peut-être rien contre les noirs mais détestent les gitans (même les gitans blancs) ou n’ont rien contre les gitans mais détestent les syriens, ou sont tout simplement homophobes, ou antisémites. Ils appliquent des stéréotypes à des identités qu’ils définissent eux-mêmes. Il est difficile dans cette optique de construire une entité opposée à partir de leurs attaques. Sarkozy peut-être vu comme un sale hongrois par des fachos.

    Le « ressenti »

    « Vous saurez jamais ce que c’est que d’être x », en remplaçant x par un individu qui a ressenti un traitement différent à cause de sa couleur de peau, sa préférence sexuelle, son origine géographique, sa culture, son handicap, on adopte une position de victime qui permet d’attribuer n’importe quelle forme de maltraitance à ce trait. Pourtant les fachos ont chacun leurs spécificités et maltraiteront plutôt certaines personnes que d’autres, nous avons tous des traits qui peuvent faire de nous des victimes de discrimination. Quand nous luttons, nous partageons tous le trait exploités, précaires, prolétaires, quel que soit le mot, nous faisons partie de ceux qui savent ce que c’est de ne pas avoir les moyens d’accéder à certaines choses, des espaces, des biens et des services, nous savons que nous n’avons pour l’instant aucun moyen d’échapper à l’exploitation qui nous est infligée, et nous la subissons tous.

    Les statistiques et généralités

    On observe parfois certains arguments qui partent de statistiques, ou venant d’organismes spécifiques ou plus ou moins évalués à partir d’un vécu. Quelle que soit la statistique, elle ne permet pas d’établir une généralité dans une interaction. Ce n’est pas parce que 80% de x subissent des préjudices que l’assistance en fera de même, il est extrêmement grave de généraliser et d’appliquer à tous les individus qu’on rencontre des stéréotypes quelle qu’ils soient, leur attribuer des façons de penser et des comportements à partir de traits physiques et sans les connaître.

    Exploitation spécifique et racisme dans l’exploitation

    Si on ne peut pas établir de système à partir d’individus qui ont recours aux stéréotypes, on peut cependant réfléchir aux exploitations spécifiques qui entrent en jeu dans la société capitaliste. Comment certains secteurs peuvent être réservés à certaines « identités » dans des modalités qui arrangent bien les patrons. Il est certes plus facile d’être embauché comme vigile à Mc Donald lorsque le patron nous voit comme un noir, homme et fort. Cependant, faut-il considérer que ces employés profitent d’un système raciste et sont favorisés face à une femme chinoise qui postulerait pour ce job ? Il n’y a aucun privilège à être utilisé comme main d’œuvre par des patrons, nous n’avons aucun intérêt à nous diviser selon leurs critères, ça serait jouer leur jeu. En attaquant directement l’exploitation, nous attaquons entre autre ces constructions identitaires qui nous asservissent à des fonctions.

    Blanc non-blanc

    Une des dérives identitaires les plus scandaleuses consiste à tenter de recomposer une identité de « victimes de racisme » autour de la couleur de peau (rappelons que ce n’est qu’un des traits du racisme, que fait-on du gitan blanc ?). On comprend tout à fait que l’objectif est antiraciste, et qu’il s’agit de créer une sorte de lutte de races pour éliminer les races, parallèlement à la lutte des classes… Néanmoins, cette unité « non blanche » fantasmée ne peut être définie qu’à partir de critères qui sont ceux des racistes. Où se trouve la limite entre blanc et non blanc ? Quel trait entre couleur de peau, origine, culture va-t-on retenir ? Nous avons tous des traits susceptibles d’être discriminés par des fachos. Ce qui est terrible dans tout ça, c’est de voir des gens opérer à des procédés qu’on peut juger racistes, attribuer à telle personne « en tant que » blanche ou « en tant que » non-blanche des stéréotypes qui, même s’ils ne sont pas forcément les mêmes que ceux des
    fachos, restent des stéréotypes appliqués à des identités construites.

    Le prolétariat comme identité ?

    On peut discuter du terme, dire qu’il n’est pas exact, on peut rajouter précaires exploités… Dans tous les cas, il ne s’agit pas de construire une identité pour lutter puisque nous ne cherchons pas à construire des stéréotypes autour du prolétariat. Il s’agit de se définir dans un système, 100% des prolétaires subissent l’exploitation, c’est ce qui les définit, ce n’est ni un ressenti ni une statistique mais une fonction qui fait système.

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