Compte-rendu de la manifestation du 29 novembre à Toulouse

150 manifestants pour un demi-millier de flics : récit d’un samedi pas comme les autres.

Alors que seulement une ou deux centaines de manifestant-e-s ont répondu-e-s présent-e-s, les flics sont plus nombreux que jamais. Il ne parait pas exagéré d’estimer qu’on atteint un ratio de 5 condés pour 1 manifestant-e. Présence policière d’autant plus ridicule que nos éléments les plus « radicaux » sont mobilisés à Lyon pour lutter contre le congrès du FN, rendant notre modeste rassemblement plus inoffensif que jamais.

Encerclé-e-s, avec pour seule porte de sortie le boulevard Honoré Serres qui amène immédiatement hors du centre-ville (que la personne qui a eu l’idée d’Arnaud Bernard pour point de rendez-vous se dénonce), nous décidons de nous disperser et de nous retrouver une heure plus tard au Capitole, où une manifestation pro-palestinienne a lieu. Alors que le mot avait circulé avec succès et que les différents groupes se mettaient en route, un manifestant croit bon de hurler, à proximité immédiate des CRS, « RDV à 15h au Capitole ! ». Ni une ni deux, les féroces de l’ordre se déploient, une partie fonçant directement au Capitole, l’autre se disposant de façon à ce qu’on ne puisse jamais que s’enfoncer dans les Minimes sans revenir sur nos pas.

Surréelle scène que cet immense quartier entièrement quadrillé par les CRS jusque dans ses moindres ruelles et ses insignifiants carrefours. Chaque station de métro que nous rejoignons est systématiquement fermée ; Minimes Claude Nougaro, Barrière de Paris. L’hélicoptère nous survole, les cordons de CRS condamnent l’avenue des Minimes, le camion à eau nous jauge. Le nord de Toulouse en état de siège. Pour 150 manifestants.

Ce n’est donc que bien plus tard (16h ? 17h ?) que nous nous retrouvons derrière le Capitole, au niveau de la sortie du métro. Assis-e-s, nous restons là un long moment, hébété-e-s par la disproportion du dispositif que nous avons eu à déjouer, mais aussi il faut bien le dire par notre désorganisation, dont il faudra un jour ou l’autre tirer des leçons.

Finalement, on se décide à marcher vers le marché du Capitole, par la rue Lafayette, dans une opération suicide digne du « djihadisme vert » le plus orthodoxe.
Des slogans fusent « police nationale, milice du capital » ; les 50m qui nous séparent de la Poste devaient constituer le seul instant s’apparentant à une manifestation dans cette triste journée du 29 novembre.

Baqueux, gendarmes et CRS s’agglutinent en masse du bout de la rue. Moment d’hésitation alors que nous leur faisons face ; certain-e-s veulent continuer, mais déjà une partie d’entre nous recule. C’est le premier groupe, d’une cinquantaine de personnes, qui sera pris en étau par un escadron de gendarme : ces derniers choisissent étrangement le parterre de « fleurs » en face de la Poste (en vrai, des arbustes piquants et de la terre humide) pour nous encercler et constituer une nasse bien serrée. A noter que ni là ni à aucun moment les flics ne firent usage de gaz lacrymogène.

L’ambiance en devient électrique, avec une centaine de personnes nous faisant face en scandant « laissez les sortir », à deux pas du morbide marché de Noël. Trois camarades (deux femmes et un homme) nous gratifient d’un « happening » en se déshabillant intégralement. Sous les flashs des photographes et les cris des manifestant-e-s, ils sont immédiatement évacués du périmètre.

Nous voilà à nous demander s’ils vont nous interpeller, nous disperser dans la violence, ou tout simplement nous laisser partir – mais quand ? Une demi heure d’attente stressante, pendant laquelle certain-e-s d’entre nous sont évacué-e-s après une fouille et un contrôle d’identité. Mais ces dernier-e-s ne sont pas libres pour autant ! Ils rejoignent une deuxième nasse un peu plus loin, contre le mur du Capitole qui se barricade derrière ses grands portails pour l’occasion.

L’ambiance ici est nettement plus détendue ; un chanteur manifestement professionnel entonne des airs d’opéra, un groupe chante des chansons anti-flics aux gendarmes, on se fout de leur gueule, puis finalement on se met tou-t-es à pisser contre le mur. Deux journalistes (sans carte de presse) sont enfermés avec nous et recueillent nos témoignages. Une demi-heure et une interpellation plus tard, les flics nous laissent sortir non sans nous faire une magnifique haie d’honneur.

C’est la fin de la « manifestation ». L’heure du bilan.

  • Pourquoi étions-nous si peu nombreux ? Comment peut-on passer de 1 500 manifestants à 150 en une semaine ? Problème de communication ? Répression qui porte ses fruits ?
  • Pourquoi ce lieu de rendez-vous ? => Pose la question de l’organisation, ou plutôt de l’absence d’organisateur(s), qui est en même temps notre force et notre faiblesse.

Deux visions non exclusives existent quant au bilan à tirer de cette journée ;

  • Les flics maîtrisent de mieux en mieux la situation, et en face nous manquons de mobilisation et d’organisation ;
  • Les flics, en surestimant grandement notre danger et notre nombre, ont largement contribué à faire exister cette manifestation en terme de visibilité et de gêne occasionnée (pour le commerce de l’hyper-centre notamment, mais aussi pour la circulation au Nord de Toulouse). Maigre consolation...

P.-S.

Crédit photo : Maxime Reynie https://www.flickr.com/photos/61283912@N07/15735844680/

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