De la misère en milieu enseignant

Un texte en réponse au comportement de la majorité des profs durant l’occupation du Mirail.
Suite à l’occupation de la fac et à la tentative de la réinventer, certains professeurs ont tenu à nous rappeler leur rôle de formateur. Devant l’absurdité et le vide de leurs propos, nous nous sentons obligé de réexpliquer pourquoi leurs prêches nous semblent vides de sens.

Certains d’entre eux sont venus se plaindre, se souvenant d’une amère défaite contre la LRU (réforme lançant la privatisation des facs). Ils en ont conclu que la lutte est inutile. Alors qu’ils sont censés nous apprendre à nous préparer à l’avenir, ils nous font croire que nous n’avons pas d’influence sur celui-ci.

D’autres sont venus nous vomir leur mépris. Le cas le plus intéressant est quand même ce magnifique « voyage au miraillistan ». Dans ce texte, le formateur parle de notre nihilisme. S’il entend par là établir un parallèle avec ce mouvement Russe de la fin du XIXème siècle, il y a en effet des ressemblances. Comme eux, nous refusons votre morale, votre loi. Mais contrairement à eux, nous aimons les arts et surtout nous nous battons pour quelque chose. Ce quelque chose c’est de vivre et d’agir dans ce monde. Mais s’il entend juste un mouvement sans idée, sans objectif, il est difficile de comprendre pourquoi il nous affuble de l’étiquette d’anarchiste, de zadiste et autre. Comment un nihiliste pourrait-il avoir une autre étiquette que celle-ci, s’il ne croit en rien ?

Il existe peut-être un vide de la pensée. Mais il est avant tout dans cette foule qui a voulu continuer sa vie sans rien voir, sans s’arrêter pour regarder. Le vide est dans ceux qui disent : « rien ne peut changer » et pire, dans ceux qui disent « rien d’autre ne peut exister ». Ces gens-là, quelle est leur pensée ? Sont-ils des êtres politiques ? (ce qui est quand même censé définir l’Humain).

Et vous, formateur, n’étiez-vous pas là, officiellement, pour nous apprendre à faire ça ? Non. Vous êtes là pour nous apprendre à nous lever au son du réveil, à faire nos heures de présence et à répéter inlassablement les mêmes schémas. Des sociologues et artistes, vous avez vocation à en faire des gendarmes et des publicistes. Des géographes, vous allez en faire des urbanistes qui orchestrent la gentrification. Vous êtes incapables d’enseigner les langues sans y mettre du management. Quant aux historiens, vous les avez transformés en rats de bibliothèque, imaginant comprendre le passé, sans même regarder le présent.

Nous avons proposé aux formateurs de venir avec nous, pour créer quelque chose ensemble. Nous avons proposé une fac ouverte à tous, sans carte ni classe, où nous serions tous acteurs des sujets abordés, avec l’aide des professionnels ayant la volonté de nous transmettre leurs passions. Or, rare ont été ces personnes qui ont répondu présentes.

Ce que nous avons fait au Mirail, c’est reprendre en main notre environnement. Ce que les formateurs font, c’est créer de la main d’œuvre pour un système qui n’en veut même plus. Oui, nous avons tagué, détruit des caméras et saccagé des locaux syndicaux. Oui, c’était de la création et un message. Si vous n’avez pas été capable de l’entendre et de le comprendre, demandez-vous ce que vous avez à transmettre. Il est probable qu’une encyclopédie ou un logiciel puissent mieux le faire que vous.

Je vous transmets au passage un petit texte qui avait circulé il y a plus d’un an. Il est d’un de vos collègues mais il n’a sans doute jamais atteint votre tour d’ivoire.

P.-S.

Le dit petit texte :

Lettre ouverte aux absents

A Toulouse, le 8, combien étions-nous pour Clément Méric ? 500, en comptant le PC et le Front de Gauche… cela fait 400.
A Toulouse, le 8, combien étions-nous de professeurs ? Une dizaine, en comptant les encartés.
A Toulouse, le 8, les professeurs ont failli.

Les professeurs ont failli parce que, justifiant l’exercice de leur magistère par l’éclosion des meilleurs, ils n’ont pas reconnu l’un de ceux-ci : Clément Méric était élève à Sciences-Po. Paris.
Ils ont failli parce que, justifiant leur compromission par l’éclosion des meilleurs, ils misaient beaucoup sur l’avènement d’une élite en rupture. Or ils n’ont pas reconnu l’un de celle-ci : Clément Méric était libertaire.
Ils ont failli parce qu’ils ont perdu la confiance de ceux qui leur étaient confiés. Aussi que quelque jour ils ne s’étonnent pas que leur revienne le vieux slogan de mai 68 -« Ne dites plus monsieur le professeur, dites crève salope »- en pleine gueule, car ils se sont déconsidérés.

Collègues, je vous hais.
Votre absence à vidé de sens notre métier

un professeur de l’enseignement professionnel

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