Sans surprise, la version policière des évènements diffère quelque peu de celle des prévenus, ainsi que de celle des témoins, nombreux ce soir là. A l’occasion d’une patrouille effectuée dans le cadre de leur mission vigipirate, deux agents seraient tombés sur une rixe opposant deux individus. Après s’être consultés, ils décident d’intervenir : le premier « tapote » l’épaule de F., s’annonce, et demande cordialement des explications sur ce qui est en train de se dérouler. F. se retourne, lui saisit violemment le col de sa tenue, la faisant « entièrement craquer sous sa force », hurle distinctement « sale flic de merde, je vais te crever », et lui assène deux coups de poing au visage, lui brisant les lunettes. S’ensuit une bagarre dans laquelle F., assis sur le policier, enfonce un doigt dans son œil dans le but de lui crever. Le troisième prévenu serait intervenu en frappant directement les policiers à l’aide de ses clefs. Résultat : 5 agents blessés, avec ITT [1] allant de 1 à 5 jours ; coudes et épaules démis, entorses au poignet…

Malgré ce récit accablant, les juges ne suivent pas les réquisitions du procureur, qui demandait 12, 18 et 24 mois avec mandat de dépôt. La version policière peine à convaincre. Les accusés racontent en effet une toute autre histoire. Mais surtout, leurs témoignages concordent, alors qu’on ne leur a pas laissé la possibilité d’accorder leurs violons avant d’être auditionnés. Pour eux, ainsi que pour celles et ceux qui étaient présentEs ce soir là, c’est le policier qui a frappé le premier : un grand coup dans les jambes, avec sa matraque télescopique, sans s’annoncer et en arrivant par derrière. C’est d’ailleurs ce qui a déclenché l’ire de la foule, choquée par les méthodes employées. Vue sous cet angle, la réaction des personnes interpellées ressemblait plus à de l’autodéfense qu’à de la rébellion… S’en est suivi un long tabassage en règle, qui continua jusque dans la camionnette des CRS ; les policiers ont en effet demandé à F. de se lever et de se retourner pour vérifier si ses mains étaient bien menottées, mais lui ont asséné en fait un coup de matraque qui devait lui casser une phalange. F. n’a pas reçu de soins jusqu’à sa comparution immédiate trois jours plus tard. En garde à vue, les policiers continuèrent à se distinguer en dégradant la nourriture que la loi leur obligeait à donner aux prévenus...

A l’issue d’une audience de 2h30, ce qui est inhabituellement long pour une comparution immédiate, la peine infligée, et surtout l’absence de mandat de dépôt, a sonné comme un désaveu poli. Il n’est donc pas étonnant que le parquet ait fait appel de cette décision.

Par conséquent, un nouveau procès aura lieu dans les prochains mois. W., F. et A. ont besoin de vous et de vos témoignages. Pour que la brutalité de l’intervention policière soit une nouvelle fois (implicitement) reconnue. Un appel à rassemblement devant le palais de justice sera par ailleurs diffusé une fois la date de l’audience connue.

Si tu étais présentE ce soir là et que tu es prêtE à témoigner devant une cour, écris à temoignagesfifigrot@laposte.net.