S’en suit immanquablement la triste enfilade de communiqués de revendication et de documents programmatiques dans lesquels on hausse le ton pour se retrouver ensuite à chercher une identité qui n’existe que parce qu’elle a été déclarée. Les actions d’attaques similaires en tout à d’autres simplement anonymes, semblent alors représenter qui sait quel saut qualitatif dans la pratique révolutionnaire. Réapparaissent les schémas de la politique et on commence à voler de façon uniforme.
Ces derniers temps de nombreux textes de revendications viennent appuyer des actes de révoltes. Comme si, certains gestes devaient être systématiquement portés à la connaissance de tous. Cela pose questions, pourquoi ces gestes et pas d’autres ? pourquoi ces modalités de revendication ? Pourquoi revendiquer ?
Entendons nous, il ne s’agit pas ici de critiquer des actes, mais bien d’interroger le sens de leur revendication.
A priori, le fait de revendiquer recouvre une dimension de partage. Il s’agit de dire simplement qu’il est possible de faire des choses, de mener des actions, à nombreux-ses ou à quelques-unes, en différents lieux, dans différentes conditions. De rattacher des actes isolés les uns aux autres, révélant ainsi un état de révolte diffus et généralisé. Et puis pragmatiquement, partager des détails techniques quand à une manière d’agir, pouvant être appropriés et répétés par chacun-es.
Mais, de plus en plus, ces revendications se limitent à dire ce qui a été fait et où cela a été fait. N’y apparaît plus le comment cela a été fait. Ce qui finit par ôter au communiqué sa valeur didactique. Certainement, pour des raisons de sécurité. Pour ne pas exposer au pouvoir les techniques de sa subversion. Sans doute. Mais j’ai le sentiment que la réappropriation par le plus grand nombre de ces techniques est une force non négligeable, qui justifie de divulguer certains secrets. Par ailleurs, le pouvoir n’a pas besoin qu’on le lui écrive pour comprendre comment des actes sont perpétrés.
En outre, ces revendications circulent dans des espaces très spécialisé, c’est à dire sur des sites militants où évolue un entre-soi. Ce qui limite considérablement la réception du communiqué. Ou pour le dire autrement, ce sont toujours les mêmes qui lisent ces revendications, ceux-là et celles-là même qui souvent en sont à l’origine. On finit par tourner en rond.
Finalement, ces sommes de revendications finissent par donner l’impression, à travers le style d’écriture employé, le vocabulaire utilisé et la localisation géographique, qu’on communique pour dire qu’on fait des choses. Construire une image de soi et de son groupe comme étant des personnes actives. On finit par revendiquer pour parler de soi, en espérant que nos paires, les autres, celles et ceux à qui on s’adresse, nous reconnaîtrons.
Au contraire, c’est la multiplication des gestes de révoltes anonymes qui donnent son caractères imprévisible et donc sa force à un mouvement insurrectionnel. Revendiquer certains gestes revient à les séparer de la multitude d’autres non revendiqués Pourtant, les gestes de révolte estampillés anarchistes ne valent pas mieux que les autres. En tout temps et en tout lieu la colère s’exprime, le plus souvent loin des projecteurs. Il s’agit là de ne pas créer une avant-garde de la revendication, prémisse à l’avant-garde de la révolution. Tout revendiquer ou ne rien revendiquer.
En plus de ça, étant donné que la plupart des actions revendiquées appartiennent au même registre (souvent du sabotage), ces communiqués tendent à en faire le mode d’action par excellence. Et donc à hiérarchiser les modes d’actions. Or, c’est la combinaison de différents modes d’action qui, de la plume au marteau, fait la force d’une insurrection.
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