Compte-rendu de l’audience du 4 avril
Ce fut l’opportunité pour Guillaume d’expliquer les raisons de son refus de se soumettre à un prélèvement biologique en vue de l’inscription de son profil génétique dans le FNAEG (Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques).
Tout d’abord, il a fait état du caractère inapproprié, disproportionné, et illégal de cette injonction de fichage génétique et du fichier FNAEG.
Inapproprié car, condamné pour violences volontaires sur personnes dépositaires de l’autorité publique sur la base des témoignages des parties civiles assermentées, le délit concerne des faits en flagrance, et aucune enquête ne justifie une telle violation de l’intégrité de son corps par l’État.
Disproportionné car, condamné à trois mois de prison avec sursis (plus dommages et intérêts), le sursis courant cinq ans , le fichage génétique dont il serait l’objet serait effectif pour une durée de 40 ans minimum ! Guillaume aura alors 73 ans, et le retrait de son profil génétique du FNAEG ne sera alors même pas automatique, soumis au bon vouloir du Procureur de la République qui ne le voudra probablement … pas ! Ceci équivaut à un fichage à vie, ou perpétuel, de son profil génétique, et la négation du droit à l’oubli.
Illégal, car la Convention Européenne des Droits de l’Homme (et de la femme ?) soumet les états ayant recours au fichage génétique a de fortes restrictions garantissant les droits humains, notamment celui du respect de la vie privée acté par l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (et de la Femme !). A ce titre, les états utilisant certains loci (sites ADN) pour établir les profils génétiques doivent garantir leur aspect non codant génétiquement, a part celui déterminant le sexe. Pourtant de récentes études scientifiques démontrent le caractère codant d’au moins trois loci parmi la dizaine utilisé par la France.
En second lieu, Guillaume s’est attaché à démontrer le caractère illusoire et mensonger de l’extension du fichage génétique et du FNAEG. En effet l’ADN est presenté à l’opinion, en vue de son consentement muet, comme l’outil scientifique ultime permettant de faire avancer la résolution des crimes (le travail de la Police), et leur condamnation et réparation (le travail de la Justice), légitimant le fichage de plus en plus massif de la population. L’ADN est partout, déposé, puis repris, redéposé, déplacé des dizaines voir des centaines de fois par jour. S’il peut-être un élément a charge lors d’une enquête et dans des circonstances très précises et étudiées, il n’est en rien la preuve ultime et absolue présentée comme telle par les médias et les séries policières mettant en scène les sections scientifiques résolvant les anciennes énigmes criminelles grâce aux progrès inédits des techniques d’investigation. A contrario, le bénéfice faible est a mettre en rapport avec le risque grandissant de voir se multiplier les erreurs judiciaires devenues irréversibles par le caractère rendu irréfutable des preuves scientifiques fournit par l’analyse des traces ADN. Mais il doit aussi être mis en regard de l’atteinte à la vie privée et à la liberté d’une proportion de plus en plus importante de la population (aujourd’hui trois millions de personnes inscrites dans le FNAEG, que l’on peut multiplier par trois si l’on considère l’ADN mitochondrial partagé par les frères et sœurs ainsi que la mère, soit près d’un sixième de la population déjà fiché). Il fit mention également de la facilité pour un esprit pervers de recueillir du matériel génétique et de le manipuler pour fabriquer de fausses preuves incriminantes envers une personne.
Ensuite, Guillaume a expliqué que l’extension sans limite autre que le fichage de la population toute entière de ce fichier sou-tendait une idéologie de déterminisme biologique portée par certaines figures politiques connues de tout le monde et dont il n’est pas nécessaire de préciser ici l’identité, idéologie qui affirme l’existence de gènes prédestinant à la délinquance, au crime, (et à l’insoumission ?). Il a affirmé que rien ne peut garantir qu’à l’avenir le fichier ne soit pas utilisé, sur une base légale, dans un but néfaste de discrimination, d’apartheid, voir d’eugénisme, et qu’en refusant la logique de fichage, il défendait quelque chose de plus important que son seul cas personnel, quelque chose qui concernerait la liberté de chacun d’entre-nous en tant qu’ individu, mais qui questionne aussi la société sur les fondements même de la liberté. Il a également rappelé que le fichier avait été instauré progressivement sans débat démocratique réel et que le consentement de l’opinion avait été obtenu grâce au traumatismes contextuels liés aux affaires alors récentes de crimes sexuels en série. Il attend de la justice qu’elle préserve les libertés des citoyens mises en danger par cette loi et ce fichier, et fait le vœu que la présomption d’innocence, principe normalement fondement démocratique de la Justice, ne se transforme pas en présomption de culpabilité future ou de récidive probable(ou l’inverse !).
Il conclut en citant la désormais célèbre phrase de Benjamin Franklin :
Une société prête a sacrifier un peu de sa liberté au profit de sa sécurité ne mérite ni l’une, ni l’autre, et perdra les deux.
Le procureur, dans son réquisitoire, a expliqué qu’il fallait abandonner toute velléité de défendre sa vie privé à partir du moment ou l’on possède une voiture, une carte bancaire, et un téléphone portable, ce qui est à la fois vrai et complètement hors de propos si l’on considère que l’ADN touche à l’intimité la plus profonde de l’individu. Il a prétendu que le fait de se rendre chez son médecin ou à l’hôpital était déjà l’occasion d’un fichage génétique, ce qui est un mensonge éhonté et d’une idiotie absolue, car en dehors de cas précis nécessitant effectivement une analyse approfondie du terrain génétique, rien ne rend automatique une telle procédure dans l’institution médicale, et que si tel était le cas, sa déontologie et le secret qui lui est lié interdirait toute perméabilité avec un fichier de Police. Au terme de cet argumentaire lamentable, nous démontrant avec brio la laideur du projet de société que les représentants de l’État et de la loi sont prêts a défendre pour un besoin fallacieux de sécurité toujours plus pregnant, il a requit un mois de prison ferme, et la révocation de son sursis précédent de trois mois, soit quatre mois fermes au total, pour un simple refus de prélèvement génétique !
L’avocate maître Mathe, dans sa plaidoirie, est revenu sur l’illégalité du FNAEG au regard des récentes recherches scientifiques, et a rappelé que les faits qui ont menés Guillaume a cette position s’inscrivent dans un engagement citoyen pour la défense de la biodiversité et des espaces naturels restants, et dans l’indignation légitime de la mort d’un jeune manifestant.
Le verdict de ce lundi 9 mai sera l’occasion de voir si la cour applique strictement des lois liberticides, ou bien considère les points soulevés par Guillaume, et se fera alors protectrice des droits fondamentaux des citoyens.
Venir le soutenir, c’est défendre les droits de tou.te.s contre les dérives totalitaires de la loi !
CE LUNDI 9 MAI, 13H20, TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TOULOUSE, TOU.TE.S CONTRE LE FICHAGE ADN !!!
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