C’est l’histoire d’un quartier qui disparait...

Un texte sur la situation actuelle dans le quartier Bonnefoï, notamment à propos de la "cantine/guinguette" qui est en train d’être installée à l’angle rue de jumeaux rue du maroc, et une invitation à une réunion pour imaginer des suites ensemble.

On se retrouve donc mercredi 10 mai à 18h au 3 rue des cheminots (turbine/atelier des cheminots). On commencera par un point info pour expliquer un peu la situation et ensuite on verra ensemble ce qu’on a envie de faire de cette aménagement dégueu et de son inauguration.
On invite à diffuser le texte qui suit, en affiche, en tract, dans vos listes mails etc.

C’est l’histoire d’une ville,

avec ses rues qui brillent, bien propres et blanches, pleines de magasins chers et identiques, surveillés partout, tout le temps par des caméras et des flics, que les pouvoirs successifs cassent et reconstruisent, aseptisent et uniformisent. Une ville qui t’invite à bien rester dans le cadre, à aller bosser, d’un point A à B, surtout ne pas s’arrêter pour zoner ou alors seulement devant une vitrine. Surtout être productif, hein !

Parce que ça doit servir à ça avant tout une ville, à l’organisation du sacro-saint travail : stoker et contrôler la main d’œuvre, la déplacer sur les lieux de travail, permettre sa reproduction. Et si on peut s’assurer une rente foncière bien juteuse sur tout ça, c’est tout benef pour tout ces spéculateur.ices, promoteur.rices, élu.es et technocrates qui font leur beurre sur la division, l’atomisation et la solitude.

Cette histoire c’est aussi celle d’une course à "l’attractivité",

une grande compétition entre métropoles où promoteur.ices et décideur.ses passent outre la vie des habitant.es pour asseoir leur utopie métropolitaine, une ville où ceux et celles qui l’habitent ne sont pas invité.e.s au banquet de la spéculation immobilière. Une ville où les discours de l’amélioration du cadre de vie, de réponse aux enjeux environnementaux et économiques tentent sans cesse de nous faire oublier que toutes ces infrastructures n’ont d’autre nécessité que le profit et le loisir des riches, spéculateur.ices fonciers, multinationales du commerce et autres grand.es criminel.les.
De nous faire oublier l’aberration écologique que cette vision de la ville constitue. Raser des quartiers existants pour en bétonner de nouveaux qui consommeront des quantités gigantesques de ressources naturelles.
Mais on s’en fout parce que dans cette histoire la ville c’est pas fait pour habiter, c’est fait pour faire du profit.

Cette histoire elle s’écrit aussi ici à Toulouse dans le quartier Bonnefoy,

maintenant et depuis 15 ans déjà. Dans ce quartier, elle prend la forme du projet TESO, renommé pompeusement en "Grand Matabiau Quai d’Oc", qui prévoit l’aménagement des quartiers autour de la gare. Son but est clair : faire de ses faubourgs populaires un immense quartier d’affaires, propre et aseptisé, directement relié au centre-ville historico-touristique et aux zones d’activités économiques de la métropole.

Et ça à la place d’immeubles d’habitation déjà existants. Le ballet des bulldozers prend place pour accomplir un projet au service de l’urbanisme violent de la mairie : démolir 4 grands pâtés de maisons pour construire de grandes barres et y installer 300 000m2 de bureaux, des dizaines de milliers de m2 de grandes chaînes de commerces standardisées, et comme toute métropole qui se respecte une grosse bite en béton et en verre que l’on nomme un gratte-ciel . Bien sûr, on nous dira qu’il s’agit de construire du logement aussi à terme, mais du logement pour qui ? Mais un nouveau quartier pour qui ? Certainement pas pour ceux et celles qui se trouvent déjà là.

C’est donc l’histoire d’un effacement.

Sans vouloir encenser une sorte de passé idéalisé, on peut quand même revenir sur ce qui s’est déroulé. C’est ainsi l’histoire de gens qui vivent dans un quartier depuis un bon moment et qui y ont fait leurs vies. On nous vend un truc fait de promesses de modernité et d’avenir radieux qu’on va payer en perdant tout bonnement la ville où nous évoluons. On ne saurait pas dire lequel des processus de merde est arrivé en premier, mais les conséquences, parfois tragiques, sont bien là. Des centaines de personnes ont eu leurs maisons ou celles de leurs voisin.es laissées à l’abandon. Les réparations de base, nécessaires à la "salubrité" des bâtiments ne sont jamais faites. La stratégie : laisser pourrir pour mieux détruire. Expropriations, travaux, expulsions, fermetures de commerces pas chers, augmentation des loyers, mise en place du stationnement payant, repeinte des façades, installation de caméras de vidéosurveillance... Il ne s’agit pas de défendre de manière nostalgique des espaces particuliers mais plutôt de prendre la mesure de ce que nous allons perdre, quand bien même c’était pas déjà la folie.

C’est l’histoire de réunions de "concertations"

où rien n’est discuté sinon la couleur des bancs dégueus ou le style de caméras implantées. Les cadres de ces concertations ayant été définis par la Mairie et Europolia, l’interlocuteur principal étant la mairie, impossible de remettre en question l’entièreté du projet.

Cette histoire c’est aussi l’histoire d’une tentative de dissimuler toute cette violence

et la nécessité d’une ellipse entre les deux étapes visibles de l’interminable projet Grand Matabiau Quai d’OC : les destructions et les constructions. L’urbanisme ayant horreur des espaces vides (qui sait qui pourrait s’installer sur ces friches ?!) ils doivent être à minima grillagés et surveillés, si possible comblés voire rentables, même temporairement. Sur plus de 800m², à l’angle de la rue du Maroc et de la rue des Jumeaux s’installe depuis avril un « restaurant à dimension solidaire ». Ce lieu ne préfigure pas ce que sera demain le quartier. Ce lieu ne vient pas d’une hypothétique prise de conscience des décideurs. Ce lieu est une caution.

Raconté par Europolia cela donne des « emprises de l’avenue [...] libérées par les déconstructions » permettant « d’informer sur le projet, en valorisant les bénéfices futurs des aménagements, y compris en phase travaux ». C’est un tour de passe-passe qui s’opère, les destructions et les expulsions d’habitant·es continuent dans Bonnefoï. Nous ne voyons dans l’aménagement éphémère de cette parcelle qu’une rapide et opportune couche de vernis social vomis par ce "collectif d’acteurs locaux et engagés"  : l’agence Intercalaire, le bar Le Poinçonneur, l’association La Cloche, l’agence Palanca. Ils sont engagés oui, pour un CDD de 3 ans au service des promoteurs Bouygues et Vinci (constructeurs de prison et autres joyeusetés) qui aménénageront à terme leurs immeubles de verre et de béton.

C’est l’histoire de plusieurs dizaines d’années de travaux incessants,

d’une ville qui ne fait que continuer d’être de plus en plus désagréable et hostile, nous rappelant chaque jour que nous ne sommes R.

Est-ce que l’histoire finie bien ?

Nous n’en savons rien. Elle a déjà connu des pauses et des embûches, des réunions publiques perturbées, des manifs, des sabotages plus ou moins impactants, des journaux, des banderoles, des tags et des affiches, des bouffes, des fêtes en pleine rue et des projections en plein air, des carnavals sauvages, des lieux squattés et toute une flopée d’activités.

Nous ne voyons pas de sens à essayer de faire au sein de Grand Matabiau Quai d’Oc, il n’y a pour nous pas de négociations ni de réformes possibles. Car il est la concrétisation de la vision d’une ville morte faite pour les riches que nous vomissons, l’incarnation du capitalisme autoritaire qui nous écrase et nous dépossède. Nous ne voulons pas collaborer avec des bétonneurs qui détruisent le vivant ni avec des spéculateurs qui jouent avec nos vies. Nous n’imaginons pas avoir la capacité d’empêcher complètement la réalisation de ce projet, mais on ne se laissera pas aménager sans rien dire, on compte bien continuer à kiffer les troubler !

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P.-S.

Tu peux aller lire un bout d’historique du projet TESO / Grand Matabiau et des textes critiques du café anti-teso (qui n’est plus actif depuis 2020) sur ce blog : https://antiteso.noblogs.org/

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