8 mars, journée internationale du droit des femmes : à la faculté du Mirail, flotte une banderole féministe ; un cortège d’étudiant.e.s se dirige vers le rassemblement prévu en ville.
Aux alentours de 13H, une manifestation d’un petit millier de personnes part du métro St-Cyprien. Des femmes et des hommes défilent ; c’est mixte la plupart du temps, sauf dans le cortège des féministes radicales. Partout,c’est plein de musique, de chants et de slogans. Lesfilles sont là, elles dansent, elles chantent ; on croise des petites filles qui s’emparent du « Qui va faire la vaisselle, nous on fait la révolution ! » : y’a de l’ambiance, ça démarre bien !
On traverse le pont, le cortège radical s’étant déplacé en tête et l’ambiance est là, autour des tambours de la batucada. Sur les trottoirs du pont St Cyprien, une vingtaine de flics regardent les dangereuses manifestant.e.s et les suivent de près. La musique, le rythme et l’entrain des manifestant.e.s sont accompagnés de messages féministes : on dénonce le sexisme, les attitudes machistes, l’oppression sociale, et même la ridiculisation de cette « journée de la femme » – Nous on veut des droits, pas des fleurs –, sous le regard curieux, amusé, sympathique, parfois moqueur, intéressé ou agacé des riverain.e.s.
Arrivé.e.s à Esquirol, toutes les petites rues sont bloquées par deux/trois flics, mais ça ne démonte personne, on défile jusqu’au musée des Augustins et là surprise, le cortège se stoppe ; on annonce la fin de la manifestation. Notre manifestation est finie ; on a à peine fait 900m et déjà, on s’arrête. Au niveau du camion de la CGT, repassé à l’avant, on annonce les rencontres féministes de la semaine et on laisse la parole à des travailleuses en grève. A l’entrée de la rue Alsace -Lorraine, trois fourgons et une vingtaine de flics en armure bloquent le passage.
« Qui va faire le ménage, nous on part en manif sauvage ! »
Des manifestant.e.s se lancent alors dans un parcours libre et s’aventurent dans Toulouse par la seule issue qui s’offrent à elles/eux : la rue du Languedoc, face à Alsace-Lorraine. Au loin, vers la station des Carmes, une voiture de police stationne en travers de la route. Ça tourne à gauche et premier écueil les flics bloquent la rue. On rebrousse chemin, moment de réflexion, et on s’engage en face jusqu’à la place de la Trinité avant de s’engager rue des Filatiers.
Tou.te.s sont mobiles, motivé.e.s et déterminé.e.s ; le fameux bagelstein – qui proposait une wi-fi gratuite « pour les filles » il y a peu– en prend pour son grade en passant. On hésite à tourner, ça perd en mobilité et voilà la première vingtaine à se faire nasser. Une rue est bloquée, un manifestant sort en force et se fait matraquer avant d’être rattrapé, les autres attendent. Finalement on contrôle les identités et on laisse sortir à l’autre bout de la rue en indiquant bien qu’il faut partir. La mobilisation ne s’arrête pas, on se regroupe de nouveau mais les flics appellent du renfort et une nouvelle nasse, plus serrée, se forme.
On attend un moment, et malgré le stress engendré par la présence oppressante des policiers –tous des hommes-, boucliers et pour certains lacrymos prêtes à l’emploi en main, on se remotive et on se soutient avec les renforts venus d’Esquirol où la mobilisation s’était arrêtée , en particulier au son des tambours des filles de la batucada qu’on entend arriver de loin.
Les manifestant.e.s sont finalement libéré.e.s de la nasse au compte-goutte après contrôle d’identité par la soixantain e de flics déployés, sans se priver de coups de pressions et de remarques déplacées –« mais t’inquiète pas, je vais pas aller plus loin », dit un flic à une jeune fille après lui avoir palpé le bras.
Départ dispersé un peu avant 16H : les flics se retirent, armée masculine pas peu fière, et certains restent même quelques instants, ramassent des pancartes et se prennent en photo avec. Ils rigolent : « Tu la mettras sur Facebook, hein ? ». Dans la rue des Filatiers, on s’est empressé de faire disparaître les quelques jets de peinture « Anti-Sexistes » en même temps qu’on a fait taire les manifestant.e.s. Les flics passent à autre chose et se targuent de petites réflexions bien placées, dans le plus grand des respects :
« -Ah tu viens pour les manifs toi maintenant ? –Ben celles où y’a plein de femmes ouais ! »
Chacun.e rentre, prend le métro, va bosser, boire un verre… 900m, moins de deux heures de temps et un humour sexiste, voilà ce qu’officiellement on aura accordé aux féministes toulousain.e.s. On est fatigué.e.s, mais encore plus déterminé.e.s : on sait pourquoi on l’a fait.
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