Confinez les préfets, libérez les sans-papiers !

Si la cruauté d’un Etat se mesurait à sa manière sadique d’enfermer ou de tenter d’expulser tous les sans-papiers, alors c’est sûr, la fRance décrocherait le pompon. Petit tour des régions pour examiner la manière dont les préfets se démènent pour faire du chiffre par temps de pandémie.

Le 16 mars, à la veille du début du confinement Macron avait sorti la pommade pour nous rappeler qu’en cette période de pandémie, il ne fallait pas oublier de « faire preuve d’esprit solidaire et de sens des responsabilités ». Dans le même temps, ses préfets étaient encouragés à mettre les bouchées doubles pour enfermer, reconduire ou expulser tous les clandos qui leur tombaient sous la main. A ce jeu-là, pas de soucis, ils excellent...
Pourtant, comme le répète l’Observatoire de l’enfermement des étrangers, « l’éloignement de ces personnes est impossible ». D’abord parce que « la plupart des liaisons aériennes avec les pays vers lesquels ces personnes devaient être renvoyées ont été interrompues ». Et puis aussi « parce que leur éloignement du territoire serait contraire aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui visent à limiter les risques d’exportation ou d’importation de la maladie ». Mais ça, les préfets s’en contre-foutent. La preuve...

ConFinis
A Toulouse, on est bien servi, merci. Le 26 février, alors que la fRance ne dénombre encore que 14 cas testés positifs au Coronavirus, l’Italie fait quant à elle face au début de la propagation qui va s’avérer aussi exponentielle qu’incontrôlable (428 cas le 26 février, 888 cas le 28 février…). C’est dans ce contexte de pandémie rampante que le Préfet de la Haute-Garonne adresse un mémoire à la présidente du tribunal administratif, pour la convaincre de reconduire au plus vite un sans-papier ivoirien de 20 ans vers... l’Italie. Avec des arguments putassier-tu-meurs : « Le risque est plus important pour Monsieur de se voir transmettre la grippe saisonnière que le coronavirus. A ce jour Monsieur n’est pas plus à l’abri du Covid-19 en France qu’il ne le serait en Italie ». Ben voyons...
Quand ils n’agite pas l’argument de la grippette, le Préfet de la Haute-Garonne s’assoit de tout son poids sur le risque médical grave que le Coronavirus ferait courir aux étrangers-ères : « Cela reviendrait à exiger la remise en liberté de l’ensemble des personnes contraintes de vivre en situation de promiscuité, que ce soit au sein de centre de rétention administrative, mais également de toute autre administration pénitentiaire ou hospitalière ». Ouais et alors ? Et ben c’est non...

« Vicieux »
Quelque part on se dit que dans la Ville Rosse on a de la chance, parce que des préfets vicieux qui n’hésitent pas à sortir les violons pour entonner un couplet humaniste afin garder les sans-papiers à distance de matraque, dans leurs foutus centres de rétention, ça existe aussi.
Tu as vu, le 19 mars, dans le nord de la France ? La préfecture du Pas-de-Calais, a demandé à ce qu’un ressortissant Albanais reste embastillé, pour éviter de le mettre « en danger de contagion pour lui-même et les autres, en dehors de l’espace de confinement que constitue le centre de rétention administrative »… Trop cool non ? Le lendemain, rebelote devant la cour d’Appel de Douai, où le même Préfet part du principe qu’un étranger est forcément « susceptible de mettre en danger sa propre santé » du moment qu’il « se trouve en dehors de l’espace de confinement que constitue le centre de rétention administrative ». Et de finir par enfoncer le clou en assurant sans rire que « le maintien du placement en rétention administrative est en l’espèce conforme au principe d’ordre public sanitaire imposant le confinement maximum de chacun ». Le même jour, les représentants de cette foutu préfecture ont changé de stratégie en affirmant dans un autre dossier « que le risque de contracter le virus COVID-19 pour une personne déjà retenue dans un centre de rétention administrative, en cette période spécifique de pandémie mondiale n’est pas plus important que si cette même personne était à l’extérieur ». Faudra penser à leur faire passer le dernier rapport de la Cour européenne des droits de l’homme qui a condamné la France pour les conditions de détention au sein de ces centres surpeuplés en les considérant comme « un traitement inhumain et dégradant »…
Mais la palme de l’hypocrisie est décernée au… Tatatatan… Préfet des Pyrénées Atlantiques ! Lequel n’a pas hésité a affirmer le 10 mars pour garder en rétention un clandestin Chinois, que c’était « pour son bien-être ».

Voyage, voyage
Le Préfet des Alpes de Hautes-Provence a quant à lui trouvé une parade à la fermeture des frontières opérée par la Tunisie pour se prémunir de la pandémie : « Si la Tunisie a fermé ses frontières terrestres, maritimes et aériennes, elle rapatrie depuis le 17 mars 2020 tous ses ressortissants expatriés et aucune preuve n’est rapportée, qu’elle n’accepterait pas ses ressortissants actuellement retenus dans les centres de rétention administrative française ». On traduit : Dans l’avion qui va ramener ses derniers ressortissants, on pourrait y entasser quelques clandos qu’on galère à expulser... Depuis le début du confinement, et jusqu’au 14 avril, au moins dix sans-pap ont été expulsés vers vers le Maroc, l’Algérie, le Congo, le Mali, le Sénégal, la Roumanie, la Géorgie. Du grand art...

Pointeuse
Au 9 avril, selon le Sinistre de l’Intérieur, il restait toujours 184 étrangers en rétention. Une première révolte de sans-papiers, pour réclamer leur libération immédiate, a secoué samedi 11 avril, le centre de Mesnil-Amelot, à proximité de l’Aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle et dans lequel demeurent enfermées 53 personnes. Elle a été aussitôt réprimée par les condés. Quant à ceux qui ont été libérés, ils se retrouvent, au même tire que le reste de la population, confinés à domicile. Pour éviter qu’ils ne s’évanouissent dans la nature, depuis le 19 mars, un nouveau décret les autorise à sortir de leur lieu de confinement pour aller... pointer au commissariat ! Arghhhhh…..

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