Latécoère est une petite France. Elle subit aujourd’hui la violence du capitalisme mondial qui n’hésite pas à détruire l’industrie française pour continuer sa course aux bénéfices. Toujours plus de compétitivité, voilà le maître mot qui touche de plein fouet l’entreprise aéronautique de Périole. Malgré une situation économique excellente, le projet « transformation 2020 », c’est une restructuration avec plus de 250 emplois impactés pour une usine qui compte moins de mille salarié.es. 170 postes détruits, 80 modifications de contrat et la moitié du travail délocalisé au Mexique, en République Tchèque ou encore en Bulgarie. Il s’agit là d’un véritable démantèlement qui fait la part belle aux actionnaires contre les travailleur.euses.
Le cynisme des actionnaires
Aux commandes de ce projet industriel, deux nouveaux fonds de pensions arrivés il y a un an, Apollo et Monarch. Ils ont tout d’abord commencé par limoger le directeur général Frédéric Michelland, avant de repousser la prise de poste de sa successeuse, Assouad Yannick. Elle devrait arriver dans les prochains jours, au bon moment pour mettre en place le fameux PSE censé sauvegarder l’emploi. Tout a bien été ficelé pendant l’été et donc en l’absence ubuesque de tout.e directeur.ice. Pas de dialogue d’entreprise. Le cynisme des actionnaires se retrouve dans les méthodes utilisées.
Les procédés sont bien connus pour limiter la contestation. Les conséquences du projet « transformation 2020 » pour l’usine de Périole ont été élaborées en toutes opacité. Les salarié.es n’ont été informé.es que le 7 juin, tiens donc ! Juste avant les congés … Un calendrier qui ne doit rien au hasard, puisque les négociations estivales ne sont jamais à la faveur des travailleur.euses. Depuis, très peu d’informations officielles et toujours au compte-goutte. Tout est fait pour laisser les gens dans une incertitude paralysante. Actuellement, l’avenir de Périole et de Latécoère en général reste donc un point d’interrogation pour les premier.es concerné.es, les salarié.es.
Le désenchantement des salarié.es
Latécoère est une petite France. Elle reflète le désenchantement d’une population qui n’a plus aucun pouvoir et très peu d’espoir. Les salarié.es sont totalement résigné.es. Un rapport d’expertise officiel, commandé par le CHSCT de l’entreprise et connu du ministère de la santé, alarme d’ailleurs sur les conséquences humaines de ce démantèlement industriel. Mais pour Christophe Poulain, ajusteur monteur depuis 4 ans dans l’Usine de Périole, « rien n’est fait, à l’intérieur, pour ces risques psycho-sociaux. » C’est une ambiance mortifère qui règne dans l’entreprise depuis l’annonce du projet.
Ce père de famille, épuisé, évoque les nuits d’angoisse que cette situation provoque. Un climat anxiogène gangrène l’entreprise et détruit peu à peu la motivation de combattre et toutes perspectives de victoires. Après 5 mois de négociations qui n’ont rien donné, la situation s’empire car l’espoir n’a cessé de se réduire. Comme à leur habitude, les syndicats se font la guerre et deux d’entre-deux (FO et la CGC) ont déjà signé les accords du PSE (Plan de Sauvegarde de l’Emploi). Rien d’étonnant alors si les derniers piquets de grèves ont rassemblé une minorité de travailleur.euses. « 80 personnes sortent » proteste monsieur Poulain pour qui ce manque de solidarité est le plus grave.
Appel à la solidarité !
L’union est empêchée par le stress, la peur et l’individualisme. Dans la tourmente, toute l’énergie des salarié.es est réservée à la sauvegarde de leur propre avenir professionnel. C’est une grande victoire du capitalisme que d’avoir créé ce chantage à l’emploi et aux indemnités qui divise tout le monde. Christophe Poulain le sait, l’union pourrait, au contraire, permettre de changer le rapport de force lors des négociations. Alors, l’ajusteur monteur qui a tout fait pour mobiliser les troupes lance aujourd’hui un coup de gueule et en appelle à la solidarité de touste.
Pour régénérer une lutte qui s’est essoufflé, il adapte son discours. Selon lui, les salarié.es sont effrayés par des idées jugées trop radicales. La suppression totale du projet « transformation 2020 » reste un espoir encore trop éloigné de la réalité. L’espérance est alors revue à la baisse avec l’éventualité d’un rachat par de nouveaux actionnaires moins enclin à tout démanteler. Pourtant, l’entreprise toulousaine n’est pas un cas isolé. Le monde du travail est en train d’abdiquer ses droits sous la pression des actionnaires. Les usines ferment et le savoir-faire est sacrifié. Si Latécoère est un petite France, alors on peut imaginer la catastrophe qui s’annonce. A ce niveau, seule une entraide généralisée dans la lutte et l’espoir de déplacer des montagnes pourrait faire tourner le vent.
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