Bon alors !
Suite à un amendement sur le FNAEG le 6 novembre 2018 dans le cadre de la loi sur la justice, la CNIL (Commission Nationale de l’Information et des Libertés) a émis une réserve importante, la presse l’a relayé un peu (vous pouvez le lire ici) et quelques avocat-es ont gueulé-es sur twitter, mais rien de plus...
Pour faire court, l’amendement prévoyait :
- une recherche "indirecte" d’une trace ADN à partir du FNAEG, soit élargir le champ de recherche d’une fiche à celui des parents, des frères et soeur, cousins, cousines... Il y a environ 3 à 4 millions de fiches sur le FNAEG, cet amendement aurait permit de retrouver au bas mot 15 à 20 millions de personnes minimun. Bah oui, plus il y a de gens enregistré, plus c’est efficace.
- la suppression de la notion d’ "ADN non codant". L’ADN non codant ne délivre aucune information génétique hormis le sexe. L’ADN codant permet d’avoir un profil génétique complet (sexe, origine ethnique, géographique, maladie...)
- également l’annonce d’un décret régulant la durée de conservation des données génétiques en fonction de l’infraction commise pour laquelle tu as était fiché. La France a était condamné par la CEDH (Cour Européenne des Droits de l’Homme) en juin 2017 sur ce sujet, ce qui a permis un nombre de relaxe conséquente lors des procès pour refus de prélévement ADN.
Bon, comme la classe politique fait semblant que la CNIL serve à quelque chose, les député-es ont modifié-es leur amendement le 4 décembre dernier, pour supprimer les phrases concernant la recherche par « lien direct » et la partie "codant" "non codant".
Ouf !
Non, on rigole.
En fait, leur modification c’est « presque » du bidon.
On reprend.
Le dernier amendement du 4 décembre 2018 dit :
« Supprimer les alinéas 8 à 10. »
Donc, supprimer les alinéas 8 à 10 du premier amendement du 6 novembre 2018 soit :
« « I D. – L’article 706‑56‑1‑1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : « en ligne directe » sont supprimés ;
« 2° Au second alinéa, les mots : « non codants » sont supprimés. » »
SAUF, que dans cet amendement du 6 novembre 2018, il reste :
« « I A. – Les deuxième et dernière phrases du deuxième alinéa et l’avant-dernier alinéa de l’article 706‑54 du code de procédure pénale sont supprimés. »
Et du coup, l’article 706-54 du code pénale, avant dernier aliéna c’est quoi ? c’est ça :
« Les empreintes génétiques conservées dans ce fichier ne peuvent être réalisées qu’à partir de segments d’acide désoxyribonucléique non codants, à l’exception du segment correspondant au marqueur du sexe. »
DONC AU FINAL :
On supprime bien la notion d’ADN non codant, et on insémine l’ADN codant. C’est à dire qu’on élargit le FNAEG a une base de données de profil génétiques hyper complète où on trouvera : sexe, maladie, généalogie, origines géographiques, ethniques…
A l’heure où le progrès sur l’ADN est hyper rapide à cause notamment de la recherche généalogique (aux états unis ils sont dingues des tests DNA), ça fait bien flipper du potentiel que les flics (et donc le gouvernement) pourront savoir sur les personnes fichées… Genre un portrait robot à partir de la trace ADN quoi.
Ce que supprime l’amendement du 6 décembre 2018, c’est uniquement la recherche par parenté indirect (frère, sœur, cousin…) ainsi que la comparaison via l’ADN codant, car on garde dans cet article ci-dessous, les parties "segments d’ADN non codants" et "en ligne directe à cette personne inconnue." Cet article reste donc tel quel dans le code pénal.
« Lorsque les nécessités d’une enquête ou d’une information concernant l’un des crimes prévus à l’article 706-55 l’exigent, le procureur de la République ou, après avis de ce magistrat, le juge d’instruction, peut requérir le service gestionnaire du fichier afin qu’il procède à une comparaison entre l’empreinte génétique enregistrée au fichier établie à partir d’une trace biologique issue d’une personne inconnue et les empreintes génétiques des personnes mentionnées aux premier et deuxième alinéas de l’article 706-54 aux fins de recherche de personnes pouvant être apparentées en ligne directe à cette personne inconnue.
Le nombre et la nature des segments d’ADN non codants nécessaires pour qu’il soit procédé à cette comparaison sont fixés par arrêté du ministre de la justice et du ministre de l’intérieur. »
La CNIL sera satisfaite et l’amendement passera très certainement comme ça. Sous pression de la police bien entendu qui attend ça depuis des années. C’est de l’enfumage complet. Surtout, qu’au vu de l’évolution du FNAEG, on sait pertinemment, qu’à la prochaine loi ou décret, ils-elles modifieront encore une petite phrase ou supprimeront un alinéa, qui élargira encore et encore le pouvoir de ce fichier.
C’est pourquoi il est plus qu’urgent et nécessaire de diffuser et de répandre la pratique du refus de prélèvement ADN avant d’être totalement engouffré dedans…
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