Récit de l’occupation et de l’expulsion de la Maison du 32 mars

Pourquoi ce lieu de lutte a été occupé, puis expulsé ; comment 19 personnes ont fait 24h de garde-à-vue et comment la solidarité s’est affirmée !

Occupation de la Maison du 32 Mars : s’organiser horizontalement contre la loi travail

A Toulouse, en tout début de semaine avait été ouverte au 36 rue Roquelaine (Jeanne d’Arc) la Maison du 32 Mars. Il s’agissait, après un mois de tergiversations et de rendez-vous manqués, de s’organiser horizontalement en dehors des syndicats et autres organisations politiques pour ne pas passer à côté du mouvement social dans lequel les autres villes de France étaient déjà rentrées de plain-pied.

Pour les occupantEs du 32 mars, aucune des trois journées de mobilisation ayant émaillé le mois de mars ne fut à la hauteur. Nous ne sommes pas reconnuEs dans les actions orchestrées par les syndicats : tours de Grand Rond et promenades inoffensives encadrées agressivement par les services d’ordre. La Maison du 32 mars avait été pensée comme un moyen de construire un mouvement qui nous ressemble, et un nouveau rapport de force à même de dépasser l’échéance du 31 mars.

Des assemblées générales réunissant entre 50 et 80 personnes s’y tenaient tous les soirs et des ateliers étaient organisés (confection de banderoles, conseils juridiques, déplacement en manif...)

Récit de l’expulsion de la Maison du 32 mars

Mercredi 30 mars, soit 72 heures exactement après son ouverture, la Maison du 32 mars est expulsée par la police. Récit.

Vers 16 heures mercredi, RG et BAC traînent dans le quartier. Quelques minutes plus tard, BAC et nationaux arrivent en nombre devant le bâtiment. Sans dialoguer, ils s’empressent de défoncer la porte. Les têtes qui essayent de regarder à travers la fenêtre se font systématiquement visées au flashball.
Après quelques minutes, les condés parviennent à enfoncer les portes : "Au sol, mains derrière la nuque, vous bougez pas". Quelques baqueux montent sur les toits à l’aide d’une échelle.
Les condés opèrent fouilles, palpations, prises d’identité, fouinent dans le bâtiment occupé et même dans le faux plafond. Une par une, les personnes sont fouillées, leur identité est relevée, elles sont mises de côté puis les condés les menottent avec des serre-flex.
Les personnes sont ensuite descendues au rez-de-chaussée et filmées une à une. Quelques baqueux jouent les mecs virils et font des blagues homophobes.
Une fois leur sale besogne accomplie, ils fouinent, amassent et ramènent au commissariat ce qu’ils qualifieront, à grand renfort médiatique, de "projectiles artisanaux". En l’espèce : des ampoules de peinture.

Dix-neuf gardes-à-vue

Croyant visiblement avoir mis la main sur un vivier de méchantEs casseuses, les flics transfèrent au comico les 19 personnes qui se trouvaient là pour une garde-à-vue.

Vingt-quatre heures plus tard, devant un dossier vide et face au refus des personnes présentes de collaborer à cette blague, celles-ci sont relâchées avec un rappel à la loi pour 17 d’entre elles, et des poursuites pour les 2 autres (avec comme chef d’inculpation : dégradation de cellule et récidive de refus de signalétique).

Une balade sauvage

En soutien à notre lieu de lutte et à nos copains et copines restéEs à l’intérieur, une soixantaine de personnes se rendent sur les lieux dès 16 heure. Un cordon policier nous empêche évidemment de nous approcher. Pour autant, on ne peut pas se résigner à les regarder cambrioler le bâtiment sans rien faire. Une trentaine d’entre nous part en manif sauvage.

Nous voilà partiEs crier notre haine des flics en direction de la rue Matabiau, balançant en travers de la route tout ce qui nous passe par la main. On allège un récup’ verre de quelques bouteilles. Magnifique accueil de la part des futurs gentrifiéEs de la rue Bayard, où apparemment on n’est pas les seulEs à avoir quelques comptes à régler avec la police. ArrivéEs place Belfort, on croise une patrouille de la nationale, trop occupée à faire chier Dieu-sait-qui pour nous calculer. On se volatilise rue Héliot.

Celles et ceux qui sont restéEs sur place, entre 30 et 40 personnes, filent au commissariat soutenir les camarades prisonnièrEs. Les keufs leur réservent un accueil... Ils.elles se font enfermer dans une nasse, filméEs et contrôléEs, avant d’être libéréEs peu après.

La presse s’empresse de faire son travail de désinformation en relayant les mensonges de la police

Plusieurs articles des médias mainstream titrent sur la découverte de "projectiles artisanaux" à l’intérieur de la Maison du 32 mars. L’expression mérite que l’on s’y arrête tant elle est vicieuse. C’est le syndicat policier Alliance qui l’a utilisée en premier dans un communiqué pour désigner... des ampoules remplies de peinture. Bien entendu, le lecteur entendra, au mieux, "des cocktails molotov".
Alors que la plupart des médias (La Dépêche, Le Figaro, Fr3 Régions) se contentent de reprendre sans aucun recul le communiqué policier (ce qui est déjà assez gratiné...), 20 minutes fait du zèle et nous qualifie de "squat de Black Blocs".

Pourtant, ces même médias disposaient d’une autre source ; le groupe Facebook de la Maison du 32 mars, sur lequel ils ont pompé allègrement leurs photos d’illustration. Or, il n’y avait pas que des photos sur ce groupe... Le tract que nous avions rédigé collectivement pour expliquer notre démarche, ainsi que l’agenda des différents ateliers y étaient publiquement disponibles. Mais parions qu’on vend plus de papier avec des black blocs qu’avec des luttes sociales... Une raison de plus, s’il en fallait, pour faire vivre nos propres médias, comme ici !

Le 32 mars après l’évacuation

Le bâtiment est dorénavant surveillé par la police et gardé par deux vigiles qui affirment que les keufs ont procédé à des relevés d’empreinte.

La "Maison du 32 Mars" (un bâtiment appartenant au Ministère de l’Économie et des Finances) est désormais tout aussi vide qu’avant.

Continuons à la faire vivre dans la rue !

Pour ne pas laisser l’expulsion muette, des barricades enflammées ont été érigées jeudi matin sur les boulevards longeant le canal du Midi, entre Bonnefoy et les Minimes.

Une banderole a aussi été préparée pour la manif :

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Le mois de mars n’est pas terminé. Au vue de la manifestation d’hier, on peut même dire qu’il ne fait que commencer.

A bientôt, dans la rue.

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