Retour sur la manif de nuit non mixte du 12 avril

Samedi 12 avril, nous étions un peu plus d’une cinquantaine à nous retrouver pour une manif de nuit en non-mixité meufs, gouines et trans*. Notre but : défendre le droit à l’avortement, libre, gratuit et sans conditions pour touTEs, ainsi que la libre disposition de nos corps. On est sortiEs dans la rue pour nous réapproprier cet espace dont nous sommes encore aujourd’hui excluEs, on n’a donc pas demandé l’autorisation à la préfecture. Contradictoire avec l’idée même que, comme meufs, gouines et trans* on faisait cette manif pour revendiquer notre droit à occuper l’espace public, y compris la nuit, moment par excellence de violences machistes et hétéropatriarcales.

On s’est donc rétrouvéEs place Saint Sernin à 20h pour faire le point "sécurité/bienveillance" de la manif’ avec celles qui étaient intéresséEs alors que la marche était appelée une heure plus tard. A 20h, il y avait déjà une forte présence policière (environ une vingtaine de keufs à coté de nous, et deux cars de CRS en plus rue du Taur), nombre qui n’a fait que monter au fur et à mesure que l’heure de l’appel se rapprochait. Vers 20h45 et avec un cordon de CRS qui nous entouraient, le commissaire est venu nous parler.

Il nous a dit d’une façon très paternaliste qu’on pouvait "aller refaire le monde dans notre débit de boisson habituel". La manif n’avait pas été autorisée par la préfecture et était donc illégale. Par contre, il avait décidé qu’il nous laissait "le droit" de nous rassembler de manière statique à Saint Sernin (obligation légale si les forces de l’ordre sont en mesure d’encadrer le rassemblement). Non seulement démago mais en plus radicalement violent : si on osait le contredire et faire une marche comme prévu, il n’aurait pas fait de sommations et nous aurait disperséEs par la force aussitôt. "Je l’ai dit une fois et je ne le dirai pas plus. Vous êtes prévenues, est-ce que c’est compris ?" Après avoir répété cette dernière question deux ou trois fois, sans obtenir aucune réponse, il est parti en disant, "je serai la-bas si vous voulez venir me parler". Comme le papa qui attend que sa petite fille raisonne un peu mieux et aille lui dire que, enfin, il avait raison.

Malgré les découragements, frustrations et confusions du moment, on a parlé entre nous et c’était clair qu’on ne pouvait pas rentrer chez nous après cet épisode, qu’on ne pouvait pas se laisser « intimider » et une fois de plus laisser la rue aux mecs, flics qui plus est. On a donc décidé de se rassembler une demi heure plus tard à Jean Jaurès, où on aurait plus de visibilité.

Pour cela, nous avons appelé à une fausse dispersion afin que touTEs nous repartions par petits groupes au point de rendez-vous. C’était sans compter les dizaines de policiers, baceux et CRS commandés de suivre chacun des petits groupes, afin de s’assurer qu’ils se dispersaient bel et bien. Filature plus ou moins discrète et pressionnée, nous nous sommes finalement retrouvéEs à Jean-Jaurès.

Et très vite, nous avons été une fois de plus encercléEs par la police et les CRS, qui nous ont méprisées pendant tout le rassemblement. Certains détournaient nos chansons, d’autres encensaient les gars relous de la rue, allant même jusqu’à prendre la défense d’une énergumène qui venait de faire un salut nazi : "Fais gaffe, elles vont te couper les couilles !", d’autres encore criaient « salles gouines », entre autres. Sans surprise, la Police se rend complice de sexisme, nazisme, et lesbophobie/transphobie.

Finalement, on s’est arméEs de courage pour avancer (après avoir sommé le commissaire et ses sbires de bien vouloir se disperser pour nous laisser circuler en toute liberté.) Une centaine de mètres plus loin, là où les passantEs étaient moins attentives parce que moins nombreuSES, les flics nous ont insultéEs, gazéEs et frappéEs, comme promis deux heures avant.

On est sortiEs dans la rue, touTEs ensemble, pour défendre notre droit à faire ce que l’on voulait avec nos corps, pour être dans la rue la nuit sans se faire emmerder. Les forces de l’ordre, suppôt de l’État nous ont démontré une fois de plus que nous n’en avions pas le droit. Avec en prime, tout un florilège d’insultes sexistes, lesbophobes, transphobes le tout saupoudré de violences machistes et policières.

Ce n’est pas sans raison que cette manif’ s’est passée ainsi : le contexte social et politique actuel en témoigne. Manif’ pour tous, Jour de Colère, Moudenc, Valls et autres réac’ de droite et droite extrême ! Raisons de plus pour lutter encore plus fort. Ensemble, contre touTEs les oppressions dont nous sommes les victimes au quotidien. Et pas seulement !
Peut-être que les flics se souviennent aussi du succès de la manif non-mixte de l’année dernière, pendant laquelle deux cents personnes avaient défilé pendant plus de deux heures, redécorant les églises, symbole de l’intégrisme chrétien qui voudrait nous faire retourner aux fourneaux et aux marmots.

Face au machisme quotidien, au paternalisme sexiste de l’État policier, continuons à nous organiser touTEs ensemble et à démontrer, par nos luttes, notre présence, notre énergie, nos vies, qu’une solidarité féministe et internationale est possible.

Nos corps, nos vies, nos luttes : crions plus fort qu’eux !

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