Samedi 1er décembre à Toulouse.

Récit partiel de la manif de samedi et courte analyse subjective non contractuelle et incomplète.

Samedi 1er décembre à Toulouse.

La manifestation des gilets jaunes est sur les grands boulevards, direction Arnaud Bernard. Sur le chemin, il y a la rue Bayard, qui mène à la Gare Matabiau « symbole de Toulouse » comme on a pu l’entendre pendant l’émeute. Un groupe essaye d’emprunter la rue pour y aller, comme ça avait était le cas le 24 novembre - ainsi que la matinée même. Les flics, visiblement flippé-es du nombre de gilets jaunes face à eux, commencent à balancer les premières grenades lacrymo.

Et là c’est parti. C’était tellement fait de manière gratuite, que les gilets jaunes se sont vnr direct. Le macdo a vu sa terrasse extérieure transformé en barricade au niveau de la sortie de métro. Les premiers projectiles, trouvés à droite et à gauche, commencent à fuser. Y’a des petits groupes déjà masqués, d’autre à l’arrache totalement, d’autre sans gants, d’autres avec, des sérums phy tournent, bref, en tout cas, personne ne s’attendait ni s’était préparé à cette journée folle.

Beaucoup de gilets jaunes sont derrières la barricade mais d’autres sont côté Jean Jaurès/Alsace lorraine. Les flics qui étaient en plein milieu à Jeanne d’Arc (une partie côté gare des bus tisséo et l’autre côté alsace lorraine) s’en prennent plein la gueule de chaque côté. Ils balancent tant bien que mal des lacrymo, mais les gilets jaunes reviennent toujours à la charge, ce qui pousse les keufs à se repliaient sous la gare des bus, à reculer petit à petit.

De là, les barricades sont avancées, tout les gilets jaunes sont ensembles, et pendant une bonne heure et demie, ils et elles vont attaquer les flics. Les projectiles sont préparés avec les moyens du bord (poteaux, gros pavés, on en a vu essayant de péter du bitume avec les pieds, faut avoir la rage quoi). Ça crie « on recharge », ça gueule « macron démission ». Ça chante la marseillaise : « marchons, marchons, d’un sang impur » tout en avançant en bloc, pierre à la main, sur les keufs, avant de tout leur balancer à la gueule et de se faire repousser par les lacrymo. Un groupe les harcèlent côté rue des moutons. La BAC répond très vite à coup de flash-ball. Le fameux « tout le monde déteste la police » a un écho incroyable et, même s’il n’est pas massif, est repris par une partie des gilets jaunes.

Y’a un groupe qui part côté rue Bayard (600/700pers), pendant que le groupe jeanne d’arc/rue des moutons (1000/1500pers) continuent à les caillasser. Les keufs lâchent prisent ! Et reculent sous les jets de pierre jusqu’à la gare Matabiau ! Alors, ça prend la rue Raymond IV direction la gare ! Ça « recharge » à chaque chantier (Toulouse comme Paris est un chantier à ciel ouvert). L’autre groupe qui est déjà à Matabiau se bastonne avec les keufs. Celui de Jeanne d’Arc arrive vers le tribunal administratif, mais pas assez nombreux ni équipés, il recule sous la charge des flics alors que certain-es essayait de les prendre à revers par la rue Matabiau. C’est à ce moment-là qu’un gilet jaune se fait exploser la tête par un tir de flash-ball (à l’heure actuelle, il est dans le coma au CHU de Purpan).

L’autre groupe qui est à Bayard maintenant redescend la rue, direction la place du capitole, y’a beaucoup de camarade dans le lot, ça chante plus « ah ah anticapitalista » que la marseillaise. La place du capitole, occupé à 90% par le marché de noël est une fausse bonne idée. Pris en étau, entre les chalets, le capitole, et les clients, le groupe revient vite vers Jeanne d’Arc. D’ailleurs, samedi dernier, la manif des gilets jaunes avaient finis là-bas tristement, alors qu’il y avait quand même une bonne énergie sur les boulevards.

A Jeanne d’Arc, c’est tout simplement 3 grosses barricades enflammés qui ont étaient érigés devant les positions des keufs. C’est le zbeul complet, le chantier du siège du crédit agricole est abondamment pillé, ça se sert pour les barricades, comme pour les projectiles. Des gilets jaunes chopent même un tuyau d’arrosage et s’en sert pour arroser les flics un peu trop près. Les barricades sont alimentées régulièrement pour pas que les keufs puissent se rapprocher, ça caillasse non-stop, et donc de fait les pompiers ne pourront pas s’approcher non plus. A ce moment, y’a pas trop de but, juste on tient la position, on tient jeanne d’arc pendant une bonne grosse heure, jusqu’à la nuit. Les gens ont la haine des keufs. On n’entend pas un seul « la police avec nous » du début jusqu’à la fin de l’émeute. Ça gueule contre les keufs « on va revenir avec les cok » « ramenez-vous sans les armes, au corps à corps ». Les vitrines, les bagnoles, finalement et proportionnellement parlant, très peu sont cassés car les gilets jaunes se concentrent sur les keufs, « les gardiens de Macron ». Seul rempart entre nous et Macron.

Comme d’habitude, le statique nous fume. Les plus motivé-es étant sur le front des barricades, les flics ont le temps de se réorganiser, et arrivent par les boulevards côté métro Jeanne d’Arc – donc par derrière, saturation immédiate et totale de la place à cause des lacrymo en 2 minutes. Les gilets jaunes se replient vers rue Bayard puis sur les boulevards en direction de Jean Jaurès. On perd la moitié des gilets jaunes sur cette charge. On se retrouve à moins de 500/700 sur les boulevards, ça monte des barricades tous les 20m/30m, en fait dès que les gilets jaunes trouvent de quoi faire. Y’a plein de petits qui rejoignent le zbeul ambiant. A Jean Jaurès, ça renverse la poubelle à verre. « ON RECHARGE ». Les flics assez loin, les gens entonnent le chant des bouteilles : ça avance de front, en faisant du bruit avec les bouteilles, putain ça a de la gueule ! Ils-elles sont peu nombreux mais une pluie de verre s’abat quand même sur la ligne de keuf. Tout se bordel va se poursuivre sur les allées Jean Jaurès, sur la place Wilson et jusqu’à François Verdier de 18h jusqu’à 20h30 au moins…

Alors quoi ?

Alors wouai, les drapeaux français, la marseillaise, ça fait un peu gerber. Wouai, bien sûr, ça représente quelque chose, ça veut dire quelque chose malgré tout. Mais faut pas croire que tu chantes ça parce que t’es faf. Ou alors, 80% des gilets jaunes sont des fafs. Non je crois qu’il faut se défaire de notre prisme de gaucho qui tend à tirer des conclusions trop vite à travers certains symboles ou certaines paroles. Les gilets jaunes font partie du prolétariat ou de la classe moyenne inférieur, qui n’ont pas forcément eu d’éducation libertaire ou qui baigne pas dans des milieux ouverts aux questions de races, de classe et de genre. Ce n’est pas pour autant qu’il faut les repousser. Comme pour les paroles sexistes, putophobes et homophobes, faut pas oublier qu’encore aujourd’hui elles sont, malheureusement, monnaie courantes dans la vie de tous les jours. Sans surtout pas minimiser certaines paroles, elles sont essentiellement dites sans fondement et par habitude. Je ne dis pas de chanter la marseillaise, mais bon, à nous de gueuler d’autres insultes, à nous de gueuler d’autres slogans. Mais c’est clair, que si on s’arrête dessus, si on se ferme à ce mouvement là pour ça, on se coupe de la quasi-totalité de la population. Arrêtons de croire que les gilets jaunes sont pas assez bien ou pas assez révolutionnaire parce qu’ils-elles n’ont pas les mêmes codes que nous. On ne vaut ni moins ni plus qu’eux : « Yellow is the new black ». Et la seule chose qui est sûr aujourd’hui, c’est que c’est maintenant et partout.

Dans les manifs syndicales ou libertaires, on est dans un milieu totalement opaque et fermé. Toujours les mêmes gens, toujours les mêmes actions, toujours les mêmes discours. Qui ne sont pas inutiles bien au contraire. Mais on ne peut pas se permettre de laisser se dérouler ce qu’il se passe aujourd’hui, c’est-à-dire le début d’une insurrection, sans nous. Sans nous, et donc en la laissant aux fascistes, qui eux ne se posent pas de question. On peut se réjouir des différentes tapes contre des fafs qu’il y a eu (plus ou moins victorieuses) à Paris, Lyon et même à Toulouse.

On est à mille lieux des émeutes après la mort de Rémy Fraisse, mêmes les barricades de rue du Taur après l’élection de Sarkozy étaient mignonnes à côté de ce qu’il s’est passé ce samedi. C’est une colère profonde qui s’exprime, bien loin des idéaux réfléchis et penser, c’est de la colère pure, de la rage exprimé et/ou soutenu par toute une classe de la population (72% de soutien après les émeutes insurrectionnelles de samedi qui ont lieu dans TOUTE la France, ça en dit long). Merci au Comité Adama d’avoir était la seule orga à assumer le fait de s’y rendre, d’y amener une position anti-raciste claire et d’appeler les quartiers populaires à en faire autant. Le sous-prolétariat même si éloigné - de fait, des principales revendications (qui tend à s’élargir) des gilets jaunes à toute sa place dans ce mouvement, qui mute en insurrection.

Samedi prochain, les flics vont être mieux préparés et carrément à cran avec tout ce qu’il vient de se passer. Les CRS sont de retour de Paris et le match de foot au stadium a était annulé pour avoir le plus de keuf sur le terrain. Il faut également s’attendre à une suspension rapide du réseau tisséo (comme en début de semaine).

Préparons-nous, organisons-nous, ramenons du matériel de protection et du matériel offensif, créons une équipe de street médic, faisons front ensemble contre la police, contre les bourgeois, contre le capital, contre les quelques fafs – mais qui sont largement minoritaires, brûlons ces putains de quartiers commerçants et bourgeois comme à Paris, brûlons la préf comme à Puy en Velay, occupons les lieux publics pour en faire des lieux d’assemblée populaire et d’accueil…

Retrouvons-nous, tout simplement.

A samedi !

PS : Et même avant avec les lycéen-es !

P.-S.

A noter, qu’il n’y avait aucune compagnie de CRS ni de GM présentent à Toulouse ce jour-là. Il y avait un peu moins d’une centaine de keuf (nationaux classique et grosse équipe de la BAC), pas du tout équipés pour des émeutes et surtout pas préparé à ça. Ce qui a permis en partie à ce que la journée se déroule comme elle s’est dérouler il ne faut pas le nier.

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  • 6 décembre 2018

    C’est comme même un peu peu chaud ton coté, "ça fait un peu gerber mais bon..."
    Je suis assez d’accord pour dire que c’est un épisode compliqué à interpréter, qui nous pousse à revoir nos filtre etc...
    Après s’aligner sur la marseillaise, les propos exluants, insultant de tout type en se disant que finalement c’est pas si grave parce qu’il y a de la casse c’est surprenant... surtout sur iaata..
    C’est quand même aussi avec de genre de poucaves que tu te defoules...

    Si ça te gênes pas trop c’est peut être juste que tu leurs ressemble physiquement ou socialement et que du coup tu te sens pas trop agressé-e... perso je trouve ça super chaud.


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