Des cheminots se mettent en grève en solidarité avec leur collègue convoqué.
A Toulouse où le mouvement de grève a été reconduit durant 9 jours, la direction régionale de la SNCF ne l’a visiblement pas digérée. Ses procédures disciplinaires, accompagnées de plaintes au pénales, à l’encontre de 19 grévistes intervient plus d’un mois après la fin de la grève, votée en assemblée le 19 juin dernier.
La direction de la SNCF et ses relais régionaux sont en guerre avec les cheminots grévistes, et les syndicats les plus représentés dans les grèves : la CGT-Cheminots et SUD-Rail. La procédure disciplinaire semble d’ailleurs avoir été dirigée majoritairement contre des cheminots qui sont encartés dans l’un ou l’autre des syndicats nommés.
Nous n’avons pas trouvé sur internet de déclaration écrite ou de communiqué de presse de ces syndicats, ni de leur fédération, qui auraient pu mieux nous éclairer sur la situation.
Toutefois, à l’appel de la CGT, SUD-Rail et l’UNSA, un rassemblement a eu lieu le 14 août dernier en solidarité à l’un des 19 grévistes ciblés, un collègue non-syndiqué qui était convoqué par la direction. Ce mouvement de grève a regroupé une soixantaine de cheminots devant le siège de la SNCF, avenue de Lyon, et a sérieusement perturbé le trafic régional puisque seul un train sur trois circulait vers le Gers et l’Ariège.
"Dégradation de matériel", "entrave à la circulation des trains", "entrave à la liberté du travail" : bref la grève...
Si nous nous arrêtons un instant sur les motifs des plaintes et des procédures disciplinaires internes, comment ne pas y voir une offensive patronale ? Si l’entrave à la circulation des trains et à la "liberté de travailler" des jaunes, non-grévistes ou anti-grévistes est réprimée après chaque grève, il nous reste quoi ? Que reste-t-il aux travailleurs grévistes comme pratique de grève à part une bête et méchante perte de salaire ? La répression des cheminots grévistes à Toulouse n’est ni un cas isolé, ni une nouveauté, elle illustre simplement à quel point le patronat a, à l’heure actuelle, les coudées franches pour porter des coups d’ampleur sur ce qu’il reste comme pratiques historiques dans les grèves et résistances ouvrières : le blocage et le sabotage de son outil de travail.
Nul doute que tout cela a été bien soft lors de la dernière grève et que la direction de la SNCF a connu bien "pire" dans son histoire. Il est juste aisé pour elle de recourir au droit bourgeois pour faire payer à des grévistes leur affront, puisque c’est un outil à sa disposition. Et puis par la répression, on peut faire peur et surtout chercher à affaiblir les futures grèves.
* Faire circuler les infos
Au regard de ce rapport de force globalement défavorable, il doit émerger des initiatives de solidarité et des rapprochements sur des bases de classe. Le rôle historique d’une confédération syndicale était justement de garantir et de mettre en pratique la solidarité ouvrière. Aujourd’hui il ne s’agit pas de combler ce désert, mais peut-être de tenter par des initiatives autonomes d’atténuer l’isolement des luttes.
A ce titre IAATA est un espace ouvert aux contributions des acteurs et actrices des mouvements sociaux. Il suffit de nous écrire à contact.iaata@riseup.net
Restructuration, répression des grévistes et austérité
En parallèle à la restructuration en profondeur de ce qui n’a déjà plus grand-chose à voir avec un service public, la SNCF a engagé un rapport de force avec ses salariés, dont une frange radicale opposée aux réformes successives. Celles-ci vont, pour faire simple, toutes dans la même direction d’austérité. Ces réformes ont toutes pour but une optimisation des économies et cherchent par ailleurs à camoufler ce qui va inévitablement avec, la dégradation des conditions de travail et du service aux usagers/clients.
La dernière en date, la réforme ferroviaire mise en place par la gauche au pouvoir, n’avance pas d’autre projet que s’attaquer à "la dette de l’entreprise" (estimée à 44 milliards d’euros). La SNCF va donc être à présent divisée en trois entreprises publiques, contre deux depuis 1997 (SNCF et RFF). La SNCF "mère" aura dorénavant deux filiales, l’une gestionnaire de l’infrastructure (SNCF Réseau) et l’autre, celle qui l’exploite (SNCF Mobilités). Tout ça se passe bien haut, mais cette restructuration n’est pas anodine, comme celles qui l’ont précédée à la Poste ou France Télécom. Pas besoin de faire un dessin, les réformes visant à faire des économies se mettent systématiquement en place contre le prolétariat. En accompagnement de ces réformes, les directions de ces entreprises publiques cherchent pas tous les moyens à affaiblir les moyens de résistance des travailleurs, le syndicalisme en tête. Et la répression post-mouvement est un phénomène qui se banalise chez les patrons.
Ce n’est un secret pour personne que le projet final des gouvernements est une privatisation de la SNCF, avec une ouverture à la concurrence prévue au max pour 2022. Et qui dit concurrence entre capitalistes dit baisse du coût du travail, nivellement par le bas des salaires et concurrence entre salariés sur le marché du travail. C’est à ce prix que les entreprises se disputent des marchés. Ça paraît loin comme ça, mais c’est déjà demain !
La SNCF reste une des rares boîtes nationales à connaître des grèves reconductibles d’ampleur. La dernière en date nous enseigne que les cheminots ont des ressources mais aussi que la solidarité extérieure doit s’amplifier.
Pour creuser un peu la dernière réforme ferroviaire
Réforme ferroviaire du ferroviaire : un bilan s’impose, 4 pages de la CGT-Cheminots (25 juin 2014)
"10 jours de désinformation et ça continue !" Tract de la fédé SUD-Rail à destination des "usagers" (12 juillet 2014).
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