Tryptique pour viols ordinaires

TW : Cet article parle de viols.

C’était des hommes.
Et ça n’a rien d’extraordinaire.

TW : Cet article parle de viols.

Comme tous les matins, je me lève et je lis les nouvelles. Ici ou là. Des petites aux grandes, des grandes aux petites. Je survole, m’arrête sur certaines.

Y’a cet article sur cette nana qui a été retrouvée dans un puit. Elle a été kidnappée, séquestrée, violée a plusieures reprises, blessée par balle et jetée dans un puit.
Normal.
Mon coeur se serre.
Je l’imagine. J’imagine mes soeurs. Je m’imagine.

Les faits se passent en Inde. L’article a été écrit en France. Par un homme ?

Ma première réaction : c’est horrible. Bien sur. Et le mot est faible. Personne ne devrait jamais vivre ça. Jamais. J’imagine sa solitude. Sa douleur. La saleté. J’imagine le mal être. Les larmes. Le mal de bide. J’imagine cette envie de tous les voir crever. Tous. De rendre les coups pour ne plus avoir mal. Comme si ça marchait. Comme si…
J’imagine et je ne suis pas elle. Je ne suis que moi. Je ne suis que mon vécu. Je ne peux qu’imaginer. Et me sentir solidaire. Car c’est finalement loin d’être un cas isolé.

Y’a aussi l’histoire de ce milliardaire, millionnaire ou je ne sais quel autre trop friqué, qui a violé « par accident » une nana.
Par « accident ».
Le type a osé, le jour de son procès plaider l’ « accident ».
L’A-C-C-I-D-E-N-T.
Genre oups, désolée j’t’ai violée mais j’ai vraiment pas fait exprès. J’ai pas trop réussi à cerner le moment où tu n’étais pas consentante. Sans rancune ?
Mais va crever !
Le gars dit clairement qu’il est sorti de sa chambre en érection et qu’il est tombé sur cette nana qui a tenté de le séduire blablabla et l’a attiré vers elle, et paf il est tombé.
La bite dans sa chatte.
Oui, oui, oui, bien sur…
Et le pire est peut-être que le tribunal a du y croire, puisqu’il a été disculpé. Ou alors, peut-être (je dis bien peut-être hein) que l’argent n’y est pas pour rien…
Peut-être que ouais, en fait que quand t’es un mec et que t’as de la maille tu t’en sors carrément mieux… ?!!

Et y’a ces centaines de femmes qui, récemment, ont été agressées en une nuit. Et étonnamment c’est pas tant que toutes ces nanas aient été violées et agressées qui pose problème mais bien par qui elles l’ont été.
Parce que visiblement quand t’es un mec et que t’as de l’oseille tu t’en sors mais quand t’es un « migrant, demandeur d’asile, sans papier » -appelez-les comme vous le voudrez- c’est pas la même paire de manches.
Eux n’ont ni la bonne gueule, ni le pécule suffisant.
Pas de ça chez nous hein. Des migrants, saletés de migrants. Ils viennent chez nous, piquent nos emplois et maintenant ils violent nos femmes ? Allez, virez moi ça vite !
Voilà un nouvel argument pour débarrasser les blancs des parasites, des sauvages violeurs de femmes.
Quelle horreur.
La menace du vioooool.
Le viol comme crime ultime.
Comme si ça n’arrivait tellement pas, qu’il fallait que ça continue comme ça. Ahahah.
La menace gronde. Ouuuuh. On ne touche pas à nos femmes hein.

Les médias ont l’impression de nous vendre des cas isolés. Quelques rares cas de pauvres femmes sans défense. Quelques cas sordides, tous plus horribles les uns que les autres. Comme on en voit au cinéma.
Les médias aiment faire dans le sensationnel.

Mais combien de femmes ? Combien de femmes chaque jour ? Combien de femmes chaque jour subissent viols et violences ?
Combien ?

Les médias aiment nous faire pleurer. Nous rapporter les histoires glauques du bout du monde. Faire pleurer dans les chaumières. Comme pour nous rappeler à quel point on est bien ici. A quel point c’est pire ailleurs. A quel point si c’est ici, c’est qu’ils viennent d’ailleurs. Mais le viol n’a rien d’exceptionnel. C’est pas une fois de temps en temps, dans une ruelle sombre, à l’ombre du bout du monde. C’est pas 4 types qui débarquent et qui te rouent de coups, c’est pas rare, c’est pas… C’est pas que ça en tout cas. C’est pas spectaculaire.
C’est pas spectaculaire.
Et c’est surtout pas extraordinaire.

C’est bien tristement ordinaire. Dans nos maisons. Dans nos lits. Entre amiEs. Entre amantEs.
Bien tristement là. Toujours. Tout le temps. Très souvent du moins.

Alors pourquoi aller chercher si loin ? Pourquoi en faire un cas à part ? Comme si ça n’arrivait que de façon ultra glauque ? Et loin. Loin là-bas, tu sais, dans ces pays, où les femmes ne sont pas respectées. Parce qu’ici tu crois quoi mon gars ? Tu crois que parce qu’on est en fRance on est épargnées ? Tsss.

Dans tous les cas, dans tous ces cas, des hommes ont agressé des femmes.
Des hommes.
Des hommes, peu importe d’où ils viennent, peu importe leur couleur, peu importe leur thune, peu importe leurs papiers.
Des hommes ont agressé des femmes.
Des hommes ont violé des femmes.
Des hommes ont une fois de plus disposé du corps de femmes. Des hommes sont encore passé outre leur consentement. Des hommes ont une fois de plus piétiné, démoli, souillé des femmes.
Des hommes.
Comme il en existe des tas.
Ici ou là.
Chez toi comme chez moi. Dans mon lit ou dans le tient.
Pas loin, tout près.
Des hommes.
Par habitude. Parce que c’est comme ça qu’on fait quand on est bourré de privilèges. Y’a qu’à disposer. Y’a qu’à venir et se servir. Y’a qu’à tout prendre. Y’a qu’à faire comme si elle n’existait pas. Comme si la personne qui habitait ce corps n’était pas là. Y’à qu’à faire comme si ce corps n’était qu’un endroit où poser ses mains. Comme si ce corps n’était qu’un réceptacle à foutre. Un simple paillasson.

C’étaient des hommes.
Et ça n’a rien d’extraordinaire.

Alors les médias peuvent continuer de nous pondre du sensationnel larmoyant. De nous faire croire qu’ici on est bien. Je sais que c’est faux.
Je continuerai de trouver ça horrible, car si cela n’a rien d’exceptionnel je ne veux pas que cela devienne banal. Je continuerai à hurler ma colère. Je ne cautionne pas les discours racistes, même sous couvert de viols. Je me fiche de savoir la couleur de mon agresseur et d’où il vient. Les actes suffisent. Je n’ai pas non plus besoin d’un tribunal pour condamner ou gracier à ma place. Je n’ai pas besoin de flics pour attester de ce que j’ai ou non vécu. Je me refuse de devoir me justifier. Je refuse que quiconque ait à le faire. Et je me moque pas mal de ce que peuvent en dire les médias. Chaque jour des femmes subissent en silence agressions et viols. Et rien ni personne ne pourra en parler mieux qu’elles.
Je soutiens par ailleurs toute femme, copine, alliée qui aura besoin de porter plainte et d’aller devant les tribunaux. Je ne crois pas en la justice mais je souhaite que chacune puisse se faire entendre comme elle le souhaite.

Avec rage.

Que crève l’état et le patriarcat !

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