Un récit de la manifestation du 13 octobre contre TESO

Samedi 13 octobre était organisée une manifestation contre le projet (TESO) Toulouse Euro Sud Ouest. Rendez-vous donné à 15h place Schumann, au milieu de la rue Bayard. Dix mètres en avant, puis dix mètres en arrière. La manif n’aura jamais quitté la rue Bayard. Récit et bilan subjectif de cette après-midi.

Ni Tour d’Occitanie, ni tour du quartier.

Une compagnie de Gendarmes Mobiles, la Nationale dans les rues alentours, la BAC et les voltigeurs qui zonent autour de la gare...le message était clair : on ne manifeste pas dans ces rues. Malgré l’intimidant dispositif policiers, une grosse centaine (200 ? 300 ?) de personnes -plus ou moins masqué.e.s, plus ou moins coloré.e.s- se retrouvent à l’heure dite.
Le Lidl récemment refait à neuf a sorti quelques gros bras supplémentaires pour garder l’entrée. La détestable nouvelle poissonnerie à la mode pour cadres friqués et pressés a fermé son rideau, les patrons et employés zieutent la manifestation en souriant.

Quelques prises de paroles ont lieu, puis des consignes sont données pour éviter les ennuis. Après un long moment d’hésitation, ça s’élance pour remonter la rue Bayard vers la gare. Là on se dit que les GM vont peut être s’écarter, que cette masse bleue est là uniquement pour intimider et intervenir si l’on venait à s’exprimer sur des vitrines ou les machines du chantier. Pure naïveté. Ils ne bougent pas. Alors on chante (merci à la chorale !) et on gueule des slogans derrière nos jolies banderoles. Puis on tente le demi-tour, pour voir si la flicaille côté place Belfort a eu consigne de nous laisser passer. Évidemment on n’a même pas envie d’essayer de redescendre la rue pour aller vers le centre-ville. Bon, place Belfort ça ne passe pas non plus...et puis si l’on s’avance trop, peut être qu’une nasse nous attend. C’est le retour place Schumann. C’est toujours joyeux, malgré la frustration de rester là.

Les flics n’ont pas bougé d’un centimètre, et nous si peu. Ça change de la manif de l’an dernier, où les hendeks étaient aussi en nombre, mais complètement passifs.
Sur la place, chacun.e vaquent à ses occupations. On chante, on se change, on achète des bières au Lidl, on colle quelques affiches, on gamberge en pensant à la sortie. Pendant ce temps des flics sont au coin de la place et film obstinément le cortège. Lentement, par petit groupe on se disperse. Là, à chaque barrage il faut montrer le contenu de son sac. Des affiches sont confisqué.e.s, certaines personnes ont leur identité relevée. Finalement sortir n’était pas trop périlleux.

Déjà vu.

Il faut se l’avouer, en dehors des cortèges syndicaux remplanplants, il devient presque impossible de manifester à Toulouse. Le même jour que la manifestation contre TESO, la très gentille marche pour le climat (#ilestencoretemps) prévue au métro Capitole se fait refouler à la Prairie des filtres « pour des raisons de sécurité ». Moudenc vient y fanfaronner. Puis une farandole s’élance sur le pont Neuf avant d’être stoppée. Les CRS empêche d’aller plus loin.

Toujours le même 13 octobre, une manifestation (déclarée) de soutien au Peuple Kurde était prévue à Jeanne d’Arc. Elle est annulée par la préfecture, pour cause de manifestation contre TESO. Pas assez de flics pour surveiller le cortège ? Le lendemain la manifestation a lieu, les flics qui l’encadraient se comptaient sur les doigts d’une main...

Récemment, fin septembre, la préfecture cantonnait la manifestation pour le droit à l’IVG à Saint Cyprien. Pourtant la manifestation était là aussi déclarée, le mot d’ordre était consensuelle. Lorsque le cortège tente de franchir le barrage sur le pont Saint Pierre, c’est gazeuse familiale pour tout le monde.

Et maintenant ?

C’était à craindre, ça se sentait venir de plus en plus depuis 2015 et l’instauration de l’état d’urgence. Pouvoir manifester est devenu un privilège. La norme c’est interdiction/nasse/répression. Toulouse avec ses centaines de caméras, sa métropolisation à marche forcée et l’expérience des flics suite aux manifestations de l’automne 2014 est évidemment un modèle à ce niveau. Bien évidemment il y a eu quelques réussites depuis, y compris au printemps dernier. Mais aussi pas mal de copaines passé.e.s en GAV ou en procès, voire qui ne viennent plus en manif.

Il est désormais nécessaires de (re ?)trouver des moyens de ne pas être piégé.e.s systématiquement dans des nasses plus ou moins resserrées, plus ou moins agressives. La solution la plus simple serait de ne plus aller en manif. Ou peut être de ne plus aller dans le centre-ville ? Mais est-ce que nous voulons vraiment nous y résoudre ? En attendant il reste d’autres manières d’agir dans l’espace publique afin de, ça et là, porter quelques coups à la machine.

Des affiches contre l’urbanisme placée dans les panneaux JC Decaux :

Des messages laissés sur les murs de la ville ce week-end :

P.-S.

Ce récit est assez personnel. Peut être que tout le monde ne s’y retrouvera pas. Alors n’hésitez pas à commenter ou à écrire un autre article. Et aussi j’aimerais bien avoir une copie des chansons de la manif.

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  • 18 octobre 2018

    Bonjour. Un petit témoignage/avis.
    Tout d’abord, c’est bien dommage (pour le dire gentiment) que ces deux manifs aient eu lieu exactement à la même heure. Ne voulant pas choisir, j’ai tenté de faire un bout des deux. Je suis finalement parti assez vite de l’étouffante "Antitéso" pour rejoindre "Proclimat" au beau milieu d’une farandole fort joyeuse.
    Très "gentille" peut-être, la "marche"… Très nombreuse aussi, familles (avec enfants), jeunes, moins jeunes, impression de têtes qu’on a pas l’habitude de voir en manif. Mais surtout, ambiance déterminée selon mon ressenti ! La farandole c’est transformée en rassemblement devant le barrage de police, rassemblement qui a duré assez longtemps (avec du monde qui reste), les gens refusant de partir et insistant (gentiment, hein…) pour qu’on les laisse passer. La circulation sur le pont Neuf était bloquée, un samedi avec beaucoup de passants qui eux aussi voulaient passer et insistaient… à la fin, les CRS semblaient ne plus en pouvoir !
    On est pas passé, bien sûr. Mais l’idée a circulé de se disperser et se retrouver à 17h30 place du Capitole, une stratégie anti-verrouillage de centre ville à méditer ! Car si nous ne sommes (c’est bien dommage) qu’une cinquante/centaine à l’avoir fait, la police (BAC furax et CRS fatigués) a du quand même se redéployer. Venant au passage voler les pancartes des manifestants, ils étaient très hésitant mais ne nous ont pas chassé, ni embarqué… Moins évident peut-être de réprimer des "gentils", mais qui criaient des slogans quand-même, au milieu de la place, Toulouse 2030 d’un côté, terrasses bondées de l’autre… À méditer encore.
    A la manif "Proclimat", avait aussi circulé l’idée de se retrouver le lendemain 16h, table ronde de clôture de Toulouse 2030 (avec Moudenc) : il y a eu une intervention de ANV COP21 Toulouse (voir lien ci-dessous) avec un peu de public averti autour. Il aurait sans doute pu y avoir d’autres interventions et plus de monde… Toujours à méditer.
    Moralité :
    Peut-être, parfois, mieux vaut
    Gentillet, tu y es… Que méchamment absent
    Bises
    T.

  • 16 octobre 2018

    Et ce même jour, à Marseille, la répression s’abat sur les opposant.e.s au début des travaux à la Plaine (gentrification du quartier en commençant par la place de vie du quartier) https://mars-infos.org/quelques-nouvelles-de-la-3416 ; https://mars-infos.org/plaine-de-vie-3414
    Les luttes urbaines s’annonçent de plus en plus tendues ! Courage !

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