Apéro chez Olivier Bouscatel !

Pour le maire de Toulouse, en ce moment, « c’est les plus petits qui trinquent ». La faute à ces hordes de sauvages qui s’approprient chaque samedi le centre de Toulouse, sans aucune pensée pour ces pauvres commerçant·e·s, en mal de chiffres d’affaires. Fort heureusement, les capitalistes du coin s’organisent, avec comme chef de file Olivier Bouscatel. Ce nom ne vous dit rien ? C’est l’homme qui tente d’attirer les projecteurs. C’est à lui qu’on doit la campagne de com’ réactionnaire et sécuritaire du lobby des commerçant·e·s toulousain·e·s hostile aux manifestations des Gilets Jaunes.

Il faut dire que ces manifs, c’est le cauchemar du centre-ville commerçant où les cortèges arrivent presque systèmatiquement à rentrer, poussant parfois jusqu’au chic quartier des Carmes. Même la rue Ozenne a perdu quelques vitrines. Alors cette opération de communication tombe à pic pour un Jean-Luc Moudenc pour qui une ville se résume à ses commerces et à la consommation. L’homme qui tente de fédérer les commerçant·e·s toulousain·e·s est un allié de circonstance pour les édiles locaux, mais est-ce une surprise ? Olivier Bouscatel ne sort pas de nul part et ne colle pas vraiment à l’image du « petit artisan » victime des samedis jaunes. Portait du personnage.

René Bouscatel

Pour comprendre qui est Olivier Bouscatel, il faut remonter un peu le temps, et les arbres généalogiques, reproduction sociale oblige. Le nom Bouscatel a beaucoup résonné dans la ville rose depuis 40 ans. Et pour cause, le Stade Toulousain a connu à partir des années 90 un succès sportif et économique inédit sous la présidence d’un certain René Bouscatel, père d’Olivier.
Avant de diriger l’équipe de rugby de 1992 à 2017, René Bouscatel était avocat, avocat de prestige même. « Le patron de l’un des plus gros cabinets d’avocats de Toulouse » disait Libération à l’époque. Un cabinet qu’il a dirigé pendant 30 ans jusqu’à être nommé bâtonnier du barreau de Toulouse en 1991 et 1992, l’équivalent de « chef » et représentant des avocats locaux. Abonné aux postes d’influences il devient Président du Stade Toulousain à la même époque, une fonction au croisement des traditions locales, du business et de la politique comme le décrit un article du site Médiacités.
C’est presque naturellement qu’il entre en politique en 2000 en rejoignant la liste de Douste-Blazy candidat à la mairie de Toulouse. Une liste d’alliance des centriste de droite (UDF) à l’ancien d’Occident Serge Didier en passant par le RPR (devenu UMP puis Les Républicains). Douste-Blazy est élu, Bouscatel père qui se disait « de gauche » devient adjoint chargé de l’urbanisme et de la culture esthétique. Sa carrière politique se poursuit en 2008, cette fois-ci avec Jean-Luc Moudenc. René Bouscatel est cinquième sur la liste et est élu, mais la mairie est emportée par le PS (un parti politique depuis disparu). Il ne retente pas l’aventure en 2014, mettant fin à son rêve de conquérir le Capitole.
Rangé du barreau, du Stade et de la politique, René Bouscatel fait désormais du consulting pour « une société de services, un promoteur immobilier d’entreprise et une banque d’affaires. [Il a] le luxe de travailler avec des entreprises dont [il] partage les valeurs ». En 2018 il est embauché par la banque d’affaire Oaklins France, de quoi faire fructifier pendant encore quelques années ses relations et son influence.

Olivier Bouscatel

Avec le CV de son père, Olivier Bouscatel n’a pas eu à traverser beaucoup de rues pour trouver un taf. A tout juste 40 ans ce « Maître Restaurateur » a déjà commencé et liquidé un paquet d’affaires et fait plusieurs fois le tour de l’hyper-centre. Son business semble commencer lorsqu’il rejoint la société « All For You » avec ses restaurants L’Envol et La Compagnie Française. Une dream-team réunissants le « prince des nuits toulousaines » et ses associés Philippe Lacassagne, François Louis Lapeyre et d’autres. Après avoir ouvert puis fermé ou vendu une poigné d’établissement comme la péniche du quai de Tounis, le voilà maintenant patron de la brasserie Les Illustres place du Capitole et du restaurant-bar du Théâtre de la Cité (ex-TNT). Son prochain projet semble déjà sur les rails, une franchise Pataya, un restaurant thaï, à deux pas du Capitole. Mauvais timing.

On fait trembler la bourgeoisie, fait trembler la bourgeoisie !

Mais si on parle aujourd’hui des Bouscatel père et fils, ce n’est pas tant pour dresser le portait de quelques hommes d’influence de la capitale de l’Occitanie que parce que le fils, ce héraut de l’art cultinaire local, est à la tête de la corporation de capitalistes qui veulent défendre le centre-ville bourgeois contre la horde de « peignes Q » [1] qui sévit en ce moment les samedis après-midi dans les rues toulousaines. L’histoire ne dit pas si, comme Moudenc, Olivier Bouscatel s’est « infiltré parmi les casseurs », mais il n’ignore sûrement pas que chaque samedi c’est certainement plus l’aggressivité des flics et l’emploi immodéré des lacrymogènes qui vident le centre-ville. Or, comme Luc Ferry et ses appels à tirer dans la foule, plus de répression n’effraie pas Bouscatel. Il va même à suggérer les commerçant·e·s du centre à s’armer. Ou du moins il ne s’en étonnerait pas. S’armer, ou...travailler ? Gratien, responsable de la brasserie de l’Opéra place du Capitole (et donc voisin de Bouscatel) déclare « être contraint de [se] mettre aux fourneaux au lieu d’embaucher ». Dilemme cruel pour la bourgeoisie, faire couler le sang ou suer.

Alors, samedi, on trinque aux Illustres ?

Notes

[1Doux surnom donné aux manifestant·e·s par Bouscatel dont il sous-estime le nombre encore plus que la Préfecture

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