Pourquoi parle-t-on de culture du viol ?

Un texte écrit par des militantes du Planning Familial 31 à l’ocassion du rassemblement au collège Lamartine.

En théorie, tout le monde est contre le viol. En pratique ? Nous vivons dans une société où les violences sexuelles sont niées, minimisées et où les victimes deviennent les suspectes pendant qu’on trouve des excuses aux agresseurs. Ça s’appelle la culture du viol et elle est transmise par la culture, l’éducation, les médias, l’humour, etc. La société est traversée par des représentations, des pratiques et des discours qui excusent, banalisent, érotisent voire encouragent le viol. En voici quelques exemples :

  • « Le viol est un phénomène marginal » : FAUX
    Chaque année, en France, on compte 256 000 victimes de viol ou de tentative de viol : 208 000 femmes dont 124 000 mineures et 46 000 hommes dont 30 000 mineurs (INSEE – ONDRP, 2014 – 2012 et CSF, 2008). Un viol se produit toute les huit minutes. Le viol est bel et bien un phénomène de masse.
  • « Le viol est largement puni » : FAUX
    La majorité des viols ne sont pas considéré comme tel devant la Justice et certains commissariats refusent aux victimes leur droit de déposer plainte. Souvent le parcours de dépôt de plainte et du procès est très éprouvant car ils met les victimes face à des policiers et des magistrats qui remettent systématiquement en cause leur parole. En France, 73% des plaintes déposées sont classées sans suite (INSEE – ONDRP, 2010 – 2015) et sur le reste la moitié sont déqualifiés en agressions sexuelles. Et toutes les procès n’aboutissent pas à des condamnations, loin de là : on parle de 1,5 à 2 % de l’ensemble des viols seulement.
  • « Le viol est le plus souvent commis par un inconnu dans une rue sombre » : FAUX
    Dans l’imaginaire commun, un viol est le fait d’un inconnu dans une ruelle ou sur un parking désert, la nuit ; le violeur a recours à la violence physique voire à une arme. « Ne rentre pas seule et pas trop tard », « Demande à quelqu’un·e de te raccompagner », « Restez en groupe »… Tous ces conseils entretiennent le mythe en question. Ces cas existent, mais ils représentent seulement 20 % des agressions sexuelles. Dans les faits, 80 % des viols (94 % si on ne prend en compte que les victimes mineures) sont commis par des proches, membres de la famille ou partenaires. Ils se produisent majoritairement au domicile de la victime, sur son lieu de travail ou d’études, et la plupart ont lieu de jour (source : Zucker, 2005, CFCV, 2003).
  • « Ce sont surtout les filles aguicheuses qui sont violées » : FAUX
    La victime serait forcement une jolie jeune fille, séductrice et provocante. L’éducation des jeunes filles (ou perçu·es comme telles) est fortement influencée par ce mythe : « Ne sors pas habillée ainsi ». En découle des questions posées aux victimes de viol comme « Tu étais habillée comment ? Tu l’aurais pas un peu cherché ? » qui culpabilisent et font porter la responsabilité de l’agression à la victime plutôt qu’à l’agresseur. On continue aujourd’hui à apprendre aux filles à « ne pas se faire violer » plutôt que d’apprendre aux garçons à ne pas violer…
  • « Les hommes ne peuvent pas contenir leur désir sexuel » : FAUX
    On entend parfois que le viol serait dû à la "misère sexuelle" ou à une impossibilité pour certains hommes de satisfaire leurs besoins sexuels. On croit parfois que les hommes auraient plus de besoins sexuels que les femmes, alors qu’aucune preuve sérieuse n’existe à ce sujet. Le viol n’a rien à voir avec la sexualité, mais avec le fait d’exercer un pouvoir sur une autre personne. Ce qui provoque le viol c’est le sexisme et la culture du viol, les blagues sur le viol qui rient des victimes et qui banalisent le viol, les films où l’on voit une femme dire douze fois non quand le héros essaie de l’embrasser, etc.
  • « Quand une femme dit non elle pense oui ou peut être : elle a envie qu’on la force » : FAUX
    Les femmes comme toutes les autres personnes,si elles disent "non" c’est qu’elles pensent non. "Elle n’a jamais dit non", "elle ne s’est pas débattue". L’idée qu’il faille prouver la contrainte exercée sur la victime pour pouvoir parler de viol est une aberration, car dans la très grande majorité des cas les victimes de viols sont en état de chocs et de sidération. Parfois il est impossible de dire non ou d’exprimer son consentement. Quand on a peur, qu’on est sous emprise, qu’on dort, qu’on est inconsciente, qu’on change d’avis, qu’on est tellement sidérée qu’on est bloquée.... ça veut dire non !

C’est l’ensemble de ces comportements, idées-reçues, discours, et les centaines d’autres que nous n’avons pas la place de citer en exemple, qui font la culture du viol. Pour en sortir, il faut tous les éliminer un par un.

Lorsque certains membres de la direction du collège et de la hiérarchie académique gardent le silence face aux viols dont ils avaient connaissance depuis des mois, ils participent à cette même culture du viol.
Lorsque que certains membres de l’équipe du collège signifient à la mère d’une victime que sa fille de 13 ans est à un âge où elle découvre sa sexualité ou que comme elle est jolie il faut qu’elle fasse attention, ils participent à cette même culture du viol.
Lorsque La Dépêche parle "d’appétit sexuel" et de "jeux sexuels’" des adolescents pour désigner ces viols collectifs, ils participent à cette même culture du viol.

Le Planning Familial 31 s’attache à déconstruire cette culture du viol auprès des jeunes lors d’interventions dans les établissements scolaires.
Mais ce qui se passe aujourd’hui à Lamartine démontre une nouvelle fois qu’il faut aller plus loin et alerte sur la nécessité que l’ensemble de la communauté éducative se forme sur les questions de violences de genre et de culture du viol. Sans quoi, la parole des victimes ou les signalements d’élèves témoins de ces violences ne seront jamais correctement entendus.

L’école a un rôle à jouer dans la lutte contre les violences de genre et la domination masculine mais pour cela, elle doit s’en donner les possibilités. Il est urgent que des fonds soient débloqués pour la mise en place , par des associations féministes et compétentes sur le sujet de formations sur les violences de genre et le consentement tant pour les adultes que pour les enfants.

Pour que la culture du viol soit remplacée par une culture du consentement !

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« Pourquoi parle-t-on de culture du viol ? » Version tract à distribuer (PDF, A4)

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