Quelle histoire ? Des embrouilles entre des personnes qui masquent des problèmes beaucoup plus larges, trop peu questionnés.
À la fin des dix jours « d’autodéfense populaire », Mixart exige un service d’ordre au dernier moment : tout le monde sait que ce lieu est à des kilomètres de l’autogestion, qu’il mange dans la main de la mairie. Leur but est de faire de la thune, il y a toujours des vigiles, et je ne compte pas, dans ce texte, faire une leçon à propos du rôle de vigile : on est meufs, on est pauvres, on est criminelles, qui ne s’est jamais embrouillé avec eux, dans la vie ?
Peut-être est-ce le moment de considérer que ce lieu n’est pas un endroit adéquat pour organiser des concerts ?
Bref, je n’ai pas suivi quel est le processus qui a abouti à ça, mais 15 antifa finissent par assumer ce rôle. Ce que je vois, c’est que le pouvoir de contrôler ce qui convient et ce qui ne convient pas est concentré entre les mains d’un groupe de mecs machos et virilistes. Ce n’est pas de l’autodefense. Quelle est la différence entre des vigiles payés et un groupe d’antifasciste qui remplit cette fonction ? Quelle est la différence entre une soirée commerciale et une soirée que l’on cherche d’organiser, en tachant de rompre avec les logiques de pouvoir qui s’y installent, sinon les méthodes employées ? Et la méthode n’est pas un mot vide, c’est par là que s’applique nos théories.
Le lendemain, soirée de clôture : les 15 mêmes mecs sont de nouveau là, à l’entrée. Quand je les interroge sur le sens de cette haie d’honneur, on me gueule dessus que c’est pour l’alerte antifa.
l’Alerte antifa ? J’’étais pas au courant, demande à des copines si elles le savaient, et suis surprise de capter que seuls des mecs, y compris mes potes, sont au courant.
Ce n’est pas par hasard que pour faire office de service d’ordre, ou pour protéger un lieu de menaces extérieures, on fasse appel à des gros mecs qui en théorie savent bien se battre, en tout cas qui font peur ; pourquoi cela, plutot que de faire tourner le mot, partager les infos et diluer la responsabilité afin que personne ne s’accapare ce pouvoir ?
Il me semblait que cette histoire était terminée. Deux semaines après le festival antirep, je vais à une soirée dans un bar.
Je vois un de ces gros gars qui fait cette fois-ci le vigile au sens plein du terme, puisqu’il est payé pour cela. Il gueule contre un autre mec qui veut rentrer, les copines qui veulent parler n’existent pas, et je m’en vais en essayant de ne pas vomir au moment où l’antifasciste-vigile dévoile son biscotto comme manière de vanter sa haine contre l’ordre policier. Moi, je pense qu’il était en train de faire le flic. De chercher un coupable. De réclamer des preuves. D’exercer son pouvoir. Apparemment, le débat portait sur une bagarre qui avait opposé le service d’ordre à un autre gars, lors de la soirée de clôture au CSA.
Toutes les fois que je me suis interrogée sur les rôles au sein de cette histoire, on m’a répondu par des paroles qui n’avaient aucun rapport : « lui a quand même dit ça », « lui est plutôt sympa », « untel est un antifa sérieux », « il fallait réagir dans l’urgence ». Ou encore sur la défensive par rapport au groupe qui s’est donné beaucoup de mal pour organiser ces dix jours. Ainsi, on a jamais pu aborder les véritables soucis.
Personne ne dit que ces dix jours n’étaient pas réussis. Personne ne dit qu’il ne faut pas être vigilant s’il y a risque d’attaque fasciste. Personne ne dit que Mixart a eu raison d’agir comme de la merde. La critique est nécessaire pour pouvoir s’améliorer, et ne peut pas rester cantonnée aux moments formels des assemblées générales.
Mais je sais que la prochaine fois que je serai confrontée à un service d’ordre de quinze mecs, soit je ne participerai pas à la soirée, parce que je ne me sens aucunement protégée par leur présence, soit je m’organiserai avec mes copines pour éliminer la menace que représente un groupe de mecs musclés auquel a été déléguée la gestion des conflits.
Une meuf féministe, donc antifasciste.
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