Repenser l’action directe : la complémentarité comme force de lutte

Alors qu’il dénonçait la violence intrinsèque de l’État et de ses lois, la supercherie du système électoral et du gouvernement représentatif, l’historien et militant Howard Zinn nous rappelait surtout que la plupart des avancées sociales et politiques avaient été, non pas octroyées par les pouvoirs en place, mais bien arrachées par la lutte, à l’aide d’une infinité de moyens. Malgré l’importance des mouvements sociaux de ces dernières décennies en Occident, ceux-ci ont trop souvent incarné la difficulté à accepter que la constitution d’un rapport de force permettant des avancées passe inévitablement par une diversité des modes d’action, et plus particulièrement par la capacité à rendre ceux-ci complémentaires [1].

L’action directe : histoire d’un concept

L’action directe, théorisée comme concept politique et outil de lutte, est principalement issue des milieux anarcho-syndicalistes ou syndicalistes révolutionnaires de la fin du 19ème siècle en Europe. Elle peut être définie de plusieurs manières en fonction des auteur·rices mais une des idées centrales est celle d’agir par soi-même dans un cadre de luttes sociales, c’est-à-dire sans passer par la délégation de pouvoir, sans intermédiaire, en fonction de ses propres moyens, pour porter des revendications collectives.

L’idée d’agir sans délégation renvoie au refus de toute forme de représentation politique et de processus parlementaire, et le fait de refuser tout intermédiaire postule une autonomie politique et le refus de toute personne interposée (organisation, porte-parole, leader,..). Le critère des moyens propres suppose quant à lui d’agir par les seuls moyens de l’individu ou du groupement en question et non en fonction de l’avis, du soutien ou de l’autorisation de forces extérieures (État, médias, organisations…).

On retrouve un principe basé sur l’idée d’autodétermination politique, dont le contenu est par définition inépuisable et dont la force est de ne pas se refuser de modes d’action a priori. Partant de l’idée que le collectif en question est le seul à même de juger, collectivement et en situation, des moyens de luttes adaptés à ses différents objectifs et ses finalités, il s’agit de faire un choix sans que la question de la légalité (légal ou illégal) ou de la morale dominante (bien ou mal) ne soient des critères préalables.

Ainsi, une action directe pourra aussi bien être légale (faire de l’auto-média, des cantines de luttes, de l’anti-répression..) qu’illégale (occuper un lieu, faire des auto-réductions, une manifestation non déclarée,...), offensive (saboter des machines de chantier, une banque,…) que non-offensive ou « non violente » (faire grève, bloquer des ronds-points, des entrepôts,…), l’essentiel étant que le choix découle d’un raisonnement collectif éthique et pragmatique [2].

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P.-S.

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Notes

[1Cet article est issu d’un atelier mis en place lors de l’Université de Printemps de Solidarités en 2017, portant sur la question de l’action directe dans les luttes politiques et dont l’intitulé était « ZADs, loi travail et action directe : de la complémentarité des modes d’actions »

[2Alors que la morale, en tant que normes ou conventions sociales, prétend définir de manière universelle ce qui est « bien » et ce qui est « mal », mener un raisonnement éthique permet de questionner politiquement ces normes pour s’en affranchir en cas de nécessité. Pour d’autres exemples d’action directe, voir Earth First ! Manuel d’action directe, Editions Libre, 2019

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