Sans idéaliser les conditions précédentes du salariat, rappelons que cette loi travail réduit à néant les maigres droits qui restaient aux salarié-e-s. Toutes les limites à l’exploitation des salarié-e-s par leurs patrons (le plus souvent issues de luttes collectives) doivent sauter pour que le contrat individuel de travail règne en maître. Les travailleur-se-s seul-e-s, atomisé-e-s, subiront donc de plein fouet l’inégalité du rapport de force entre elleux et le capital.
De multiples formes de résistance à cette loi se sont mises en place pendant et depuis des mois : assemblées, sabotages, manifestations, grèves, blocages. De son coté, l’État a déployé les multiples facettes de sa répression : de la violence du coup de poing contre le lycéen de Bergson à Paris aux intimidations des militant-e-s, comme aujourd’hui à Foix, le pouvoir nous isole pour mieux nous contrôler et briser nos luttes.
À présent l’État confie aux tribunaux la tâche d’enterrer le mouvement.
Contre la violence de l’atomisation de
nos vies et de nos luttes par le travail
capitaliste, sa police et sa justice :
solidarité et action collective !
Abandon des poursuites pour Marianne et pour
tou-te-s les inculpé-e-s du mouvement social !
Rassemblement aux halles Villote à Foix
le 11 octobre 2016 à 12 h 30
Le collectif 09 contre le travail et ses lois
Lettre ouverte
ALERTE REPRESSION ..ALERTE REPRESSION : ceci n’est pas une simulation
aux camarades qui gagnent leur pain dans l’éducation nationale
Enseignante de philosophie au lycée G. Fauré de Foix je passe en procès le 11 octobre suite à ma participation à une manifestation lycéenne (le 24 mars 2016) contre la loi El Khomri. Je suis accusée d’avoir "outragé deux fonctionnaires de police, organisé un rassemblement non déclaré et provoqué à la rébellion (débrayage de cours et jets d’œufs sur le local d’un parti politique)". J’étais la seule enseignante à accompagner les élèves ce jour là et je n’ai pas l’habitude de serrer la main des RG dont deux exemplaires nous ont suivis pendant toute la manifestation. Les plaintes émanent de ces deux exemplaires et de l’éducation nationale en la personne du proviseur d’un lycée professionnel de Foix.
Je m’adresse à vous car ce procès relève d’une situation politique globale qui dépasse ma seule personne et menace désormais tous les personnels qui assument une solidarité "politique" avec les élèves alors même que celle-ci s’exprime dans l’espace public de la rue et hors des murs de leur propre établissement.
Les temps ont bien changé. Du coté des enseignants l’abandon du combat politique fait qu’on peut se retrouver seul/seule dans la rue avec les élèves [1] et du coté de l’Etat la présomption d’un simple débrayage de cours ou du jet de quelques misérables œufs sur un local du PS mérite la correctionnelle. L’attitude de retrait des enseignants et l’agressivité de l’Etat vont bien sûr ensemble. Plus on aura peur des conséquences judiciaires de nos engagements et plus la "justice" frappera fort. Plus on aura peur de s’engager dans des actions collectives et plus on exposera ceux et celles qui le font à être la cible de la "justice". [2]
Ce procès n’est qu’un signe de la dimension sécuritaire qui prend le pas sur la dimension critique dans l’éducation nationale comme dans la société en général (dimension critique qui est pourtant la finalité que les bourgeois eux mêmes ont théoriquement donnée à l’école républicaine).
Pourquoi tant de caméras de surveillance se mettent-elles en place dans les établissements scolaires alors qu’il faut par ailleurs être très prudentEs dans ce que l’on peut dire sur les derniers "attentats" ? [3] Pourquoi faut-il exécuter des exercices "alerte confinement attentats" dont l’efficacité est discutable alors que les programmes d’histoire de terminale ne rendent pas obligatoire la réflexion sur la guerre d’Algérie ? Pourquoi doit-on "se protéger" obsessionnellement plutôt que de s’exposer à comprendre ? Pourquoi tenter de comprendre des évènements nous expose-t-il à des sanctions alors que la seule existence de ces événements justifie du point de vue de l’Etat la mise en place de mesures sécuritaires et liberticides ? [4] Est-il interdit de parler de la responsabilité des Etats dans les menaces terroristes ou encore nucléaires (je rappelle qu’on a aussi l’exercice "alerte accident nucléaire" alors que la France est le deuxième pays au monde en termes de nombre de centrales nucléaires) ? Le "devoir de réserve" quand il atteint de telles proportions est-il autre chose qu’un diktat idéologique ? De même pourquoi l’éducation nationale nous propose-t-elle de faire appel à une comique "réserve citoyenne" pour parler en classe des sujets conflictuels si ce n’est pour s’assurer que le dogme républicain sera bien respecté ? [5]
Du coté des élèves et de leurs parents la pression monte aussi en intensité. De la même façon que le travail salarié envahit de plus en plus ce qu’il reste de vie aux salariéEs on peut lire par exemple dans certains règlements intérieurs que les élèves internes "représentent la cité scolaire à l’extérieur de l’établissement" et doivent "adopter un comportement exemplaire lors de leurs sorties libres". [6] De même, sous prétexte de "coéducation", les administrations des collèges et des lycées, de plus en plus incapables de parler aux enfants et aux adolescentEs, harcèlent parfois leurs parents en leur téléphonant plusieurs fois par jour pour qu’iels justifient leur moindre retard, tout cela avec un ton moralisateur détestable.
Si nous continuons à exercer le métier d’enseignant/te n’est-ce que pour le salaire ou bien parce que l’on estime que l’on peut encore jouer un rôle dans la construction de la réflexion politique/critique des élèves ? Si on a encore cet espoir pourquoi ne sommes nous pas plus combatifs.ves contre ce qui ruine cet espoir ? Avoir un idéal révolutionnaire d’émancipation alors qu’on est fonctionnaire de l’Etat est certes un paradoxe mais ne vaut-il pas mieux faire vivre ce paradoxe plutôt que de le supprimer en se contentant de "fonctionner" ?
Des camarades ont organisé un rassemblement de soutien sous la halle de vilotte à Foix le 11 oct à partir de 12h30 (le procès a lieu à 14h). Tous les personnels de l’éducation nationale sont couverts par le préavis de grève hebdomadaire du syndicat national Sud Education.
Une caisse de solidarité financière a été ouverte ; on peut envoyer des chèques au nom de marianne thomat à l’adresse suivante :
solidaires 09 (soutien marianne)
21 rue des chapeliers
BP 128
09003 Foix cédex.
L’argent qui ne sera pas utilisé pour mon procès sera versé à la legal team de Toulouse.
Marianne Thomat.
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