Aux camarades syndiqué-e-s

Ce qui s’est passé jeudi 28 avril est inédit. C’est très grave. Jamais les flics n’ont eu la partie si aisée. Jamais une manif n’a été si minable et piteuse. Quelle démonstration de faiblesse !

L’intersyndicale, dans son appel à la manif toulousaine du 28 avril, fustigeait « l’utilisation par le pouvoir politique des forces de l’ordre dans l’objectif de museler le mouvement social avec toutes les dérives inadmissibles, dont la violence contre des manifestants. » En outre, elle appelait « l’ensemble des salarié-es privé-es d’emploi, étudiant-es, lycéen-nes, retraité-es, à se mobiliser à nouveau par la grève et à participer massivement aux manifestations du 28 avril. »

Or, que s’est-il passé ?

Avant même la moitié du parcours de la manif, les différents camions syndicaux (à l’exception, provisoire, de celui de SUD) ont abandonné le cortège et sont retournés à leurs bus (allée Jean Jaurès). Le cortège « sans étiquette », qui se trouvait en tête de manif, s’est ainsi retrouvé seul, face aux flics qui l’ont cerné et empêché d’avancer (notamment au moyen de grenades dites de désencerclement).
Voici le communiqué de la Préfecture, la CGT (et les autres syndicats) n’ayant vraisemblablement pas eu le courage de s’expliquer publiquement :
« Lors de la manifestation se déroulant à Toulouse dans le cadre de la journée nationale interprofessionnelle de mobilisation, de manifestation et de grève, contre le projet de loi Travail, des jets de projectiles très nourris ont eu lieu contre les forces de l’ordre, par des individus aux visages dissimulés situés en tête cortège. Deux policiers ont été légèrement blessés au crâne. Après contact avec les organisateurs, il a été décidé d’interrompre la manifestation à hauteur de la rue du Rempart Saint-Étienne. »

Nous étions dans le cortège de tête. Nous n’avons pas vu ces « tirs nourris ». Les eussions-nous vu, que nous nous en serions solidarisé. La CGT (comme les autres syndicats) a fait le contraire : avant même qu’il ne se soit passé quoi que ce soit, et en accord avec les flics, ils ont décidé le lâche abandon des « sans étiquette ».
À Nantes, où la manifestation a été autrement « violente », le service d’ordre de la CGT, loin de se comporter comme à Toulouse, a fait en sorte que le cortège ne se divise pas ; on rapporte que des personnes arrêtées par les flics ont été libérées par ce service d’ordre... C’est là le vrai rôle (et le seul rôle possible) de l’autodéfense syndicale : protéger les manifestants... des flics. Empêcher les flics d’interrompre, d’attaquer, de disloquer une manif.
Eh bien, non. À Toulouse, le service d’ordre de la CGT était fièrement recouvert d’autocollants « syndicaliste, pas voyou ». Le mot « voyou » résonne de manière sinistre à nos oreilles, il résonne comme un mot qui ne nous appartient pas, comme un mot du pouvoir. Il fut un temps où les « syndicalistes » étaient solidaires des « voyous » contre l’État et les patrons. Et puis il ne viendrait pas à l’idée des « voyous » de porter un autocollant « voyous, pas syndicalistes »... Jamais les manifestants « violents » n’ont empêché des pacifistes d’être pacifistes. Mais l’inverse se produit à chaque manif, y compris... violemment. Face à l’État, face au capital, il y a une diversité de pratiques ; ces pratiques, loin d’être exclusives, se renforcent mutuellement.

Jeudi, le S.O., vexé, a commencé la manif en menaçant les jeunes qui en avaient pris la tête. Puis, frustrée certainement de ne pas « conduire le mouvement », et après tractations avec la Préfecture, la CGT (qui ? la direction ? le S.O. ?) a préféré quitter le navire, tâchant d’entraîner les autres à sa suite.
Heureusement, un grand nombre de militants a choisi de rester avec la tête. Pas longtemps, hélas, puisque les flics avaient désormais les coudées franches pour pousser tout le monde dans les ruelles, dans une brève course-poursuite qui s’est soldée par – au moins – sept arrestations (bilan policier).

Ce qui s’est passé est inédit. C’est très grave. Jamais les flics n’ont eu la partie si aisée. Jamais une manif n’a été si minable et piteuse. Quelle démonstration de faiblesse !
Il importe que les syndiqués « de base » fassent pression sur leurs directions pour que de tels événements ne se produisent plus jamais. Sans quoi, le mouvement social est condamné à brève échéance.
Instaurer, à nouveau, un rapport de confiance entre les syndicats et les « sans étiquette », y compris en dépassant la diversité des pratiques, va être difficile. C’est néanmoins indispensable.

C’est par l’unité des exploités, voyous ou syndicalistes, avec ou sans « projectiles », qu’on construira un mouvement social fort, capable d’arracher des victoires à nos vrais ennemis : l’État, les patrons.

Quelques manifestants « sans étiquette ».
région de Toulouse, le 29 avril 2016.

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Aux camarades syndiqué-es - 28 avril manif a Toulouse

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  • 30 avril 2016

    salut, je pense juste que le mot voyou c’est celui qu’ils emploient dans leur slogan "patron -voyou" mais peut-être que c’est le mot en général qui pose problème > réfléchir sur ce qu’on définit comme criminalité, en tous cas c’est clairement un des syndic qui montent le + au créneau pour dénoncer la criminalisation des mouvements sociaux pendant que beaucoup en profitent pour l’affaiblir - je roule pas pour eux mais ca empeche pas d’être lucide sur ce qui n’est pas son petit monde à soi
    aussi je sais pas si vous parlez que de la cégète ou de cégète et fo, qui sont pas tout à fait les mêmes mais c’est la cégète qui se mange tout on dirait

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